16 jours dans le Queyras du 14 au 29 août 2016

Voici tout d'abord une carte générale montrant toutes les étapes de ma randonnée dans le Queyras. Les dates indiquées sont celles correspondant au départ de chaque étape. Par exemple, je suis parti de Mont-Dauphin le 14 août pour aller au refuge de Furfande.

On trouvera ci-après une description précise de ces 16 étapes avec des renseignements sur les hébergements. L'accueil, le confort, le repas et les prestations sont notés globalement par des ou des

Date

Etape

Infos

Durée de l'étape

Distance

Dén >0

Den <0

14 août

Mont Dauphin - Refuge de Furfande

R-Rs

9 h 00

21 km

+ 1940 m

- 520 m

15 août

Refuge de Furfande – Souliers

G-Rs

 8 h 10

21 km

+ 1120 m

- 1590 m

16 août

Souliers – Les Fonts de Cervières

R-Rs

7 h 00

18 km

+ 1300 m

- 1120 m

17 août

Les Fonts de Cervières - Le Roux d’Abriès

G-Rs

 8 h 00

17 km

+ 1150 m

- 1440 m

18 août

Le Roux d’Abriès – Refuge Granero

R-Rs

8 h 00

20 km

+ 1560 m

- 930 m

19 août

Refuge Granero - Refuge du Viso

R-Rs

6 h 50

11 km

+ 1050 m

- 970 m

20 août

Refuge du Viso - Refuge Quintino Sella

R-Rs

7 h 40

13 km

+ 1140 m

- 960 m

21 août

Refuge Quintino Sella - Refuge de Valante

R-Rs

7 h 00

10 km

+ 810 m

- 1000 m

22 août

Refuge de Valante - Refuge de la Blanche

R-Rs

10 h 30

24 km

+ 1950 m

- 1890 m

23 août

Refuge de la Blanche - Saint Véran

G-Rs-Rv

6 h 00

14 km

+ 690 m

- 1160 m

24 août

Saint Véran - Ceillac

G-Rs-Rv

7 h 15

18 km

+ 1250 m

- 1650 m

25 août

Ceillac – Refuge de Basse Rua

R-Rs

 7 h 30

16 km

+ 1310 m

- 1200 m

26 août

Refuge de Basse Rua – Ceillac

G-Rs-Rv

 7 h 50

17 km

+ 1270 m

- 1380 m

27 août

Ceillac – Refuge de Furfande

R-Rs

8 h 00

18 km

+ 1740 m

- 1080 m

28 août

Pic du Béal Traversier

R-Rs

5 h 50

10 km

+ 890 m

- 890 m

29 août

Refuge de Furfande - Mont Dauphin

 

6 h 50

21 km

+ 270 m

- 1660 m

G : Gîte, H : Hôtel, R : Refuge ou T : Tente. Rs : Restauration, Rv : Ravitaillement possible à l'arrivée, Rc : Ravitaillement possible en cours d'étape. DP : Demi pension, TS : Taxe de séjour, PN : Pique nique, CB : Carte Bancaire. Il y a des douches chaudes partout, parfois payantes dans les refuges italiens.

La durée de l'étape s'entend tous les arrêts compris (pique-nique, pause boisson ou photos). Dans les tableaux qui suivent, les heures indiquées sous l'itinéraire sont les heures effectives de passage aux endroits précisés.

En cliquant sur la date au début du tableau de chaque étape, on revient au tableau général ci-dessus. En cliquant sur Itinéraire dans la description de chaque étape, on pourra visualiser le parcours sur la carte IGN. En cliquant sur Profil, on pourra visualiser le profil de l'étape tel qu'il est donné par Openrunner. Attention, certains fichiers sont assez volumineux et leur transfert peut prendre pas mal de temps si vous n'avez pas l'ADSL...


14 août 2016

Mont Dauphin – Refuge de Furfande

Longueur étape : 21 km

Heure départ : 8 h 00

Heure d'arrivée : 17 h 00

Durée effective de marche : 8 h 00

Dénivelée cumulée : 2460 m

Déniv. positive : 1940 m

Déniv. négative : 520 m

Alt min : 890 m

Alt max : 2458 m

Itinéraire (802 Ko) - Profil (73 Ko)

8 h 00 – Départ de Mont-Dauphin, 890 m
9 h 30 – Les Demoiselles Coiffées, 1220 m
10 h 30 – Cabane du Bois Durat, 1570 m
12 h 00 – Pique-nique (35 minutes), 2000 m
13 h 30 – Col de Moussière, 2352 m
14 h 00 – Lac du Lauzet, 2205 m
15 h 10 – Col Saint Antoine, 2458 m
15 h 50 - Intersection avec le sentier du Col Garnier, 2160 m
16 h 30 - Oratoire des Granges de Furfande, 2286 m
17 h 00 - Refuge de Furfande, 2300 m

Météo toute la journée.

Le film de l'étape : J'ai pris le train de nuit de 21 h 22 à Paris-Austerlitz pour Mont-Dauphin-Guillestre. Nuit tranquille à deux dans un compartiment avec 4 couchages en 1ère classe. J'étais avec une dame assez âgée, mais pas trop car elle s'est installée dans la couchette supérieure comme d'habitude. Elle fait le voyage régulièrement et m'assure que la SNCF doit maintenir ce train de nuit au moins jusqu'en 2020. Elle est descendue à Veynes à 6 h du matin et j'ai eu tout mon temps pour prendre un petit-déjeuner sommaire (avec les quelques galettes qui me restaient, car il n'y a pas de wagon-bar dans les trains de nuit) et me préparer ensuite en configuration randonneur avant d'arriver à Mont-Dauphin à 7 h 50. A la descente du train, je n'ai qu'à régler mes bâtons et en route !
J'avais repéré un raccourci en face de la gare pour rejoindre le centre d'Eyguiers. En fait, au bout de 300 m, il y a une jolie maison ! Cul de sac, propriété privée et demi-tour. Il m'est déjà arrivé la même mésaventure l'année dernière lors de ma première étape. Pas de chance. Finalement, ce contretemps me fait passer devant la boulangerie "La Galette de Vauban" que j'avais aussi repérée sur internet. J'en profite pour acheter un petit pain aux raisins pour compléter mon petit-déjeuner. Je monte progressivement dans les ruelles d'Eyguiers et je découvre les sommets des Ecrins qui apparaissent peu à peu : l'Ailefroide, le Pic du Coup de Sabre, le Pic sans Nom et la Pointe Puiseux du Pelvoux.
J'arrive enfin près des Combes où le sentier démarre en rive gauche d'un torrent presque à sec. La montée est assez facile, le sentier est bien tracé, même si le balisage est pratiquement absent. Mais mon sens de l'orientation y supplée sans difficulté. Au détour du sentier, des drapeaux de prière (comme au Népal) attirent l'attention sur les Demoiselles Coiffées toutes proches. Après la Cabane du Bois Durat, on peut aussi admirer mais de loin les Demoiselles du Merdanel, bien visibles au milieu du ravin qui porte le même nom. Je m'hydrate toutes les heures et la fatigue commence à se faire sentir. Je pense que j'ai mis la barre un peu haut pour cette première étape : plus de 1900 m de dénivelée positive sans entraînement avec mon gros sac lesté de 5 pique-niques et de 2 litres d'eau... Je comptais m'arrêter au Col de Moussière, mais finalement je décide de pique-niquer à midi dans l'ombre accueillante d'un sous bois. Depuis presque 2 heures, je suis attaqué sans répit par les mouches et j'ai beau essayer de les chasser, rien n'y fait.
Je repars vers 12 h 30 et j'arrive au Col de Moussière une heure plus tard. Déjà un bon morceau de fait ! Mais la suite est en montagnes russes. Après une petite pause, je descends au Lac du Lauzet, un coin tranquille qui incite à la sieste, mais pollué visuellement par les 4x4 et les barbecues qui sont de sortie aujourd'hui. Je salue au passage un troupeau de moutons qui somnole à proximité et j'attaque la dure montée au Col Saint Antoine. La fin est difficile, j'ai soif (même en buvant régulièrement) et les muscles des cuisses commencent à rouspéter. Au col, je pense que le plus dur est fait, mais j'aperçois dans la descente, bien loin dans un autre vallon, des chalets qui me laissent penser que le refuge de Furfande doit se trouver par là bas. Un coup d'œil rapide sur la carte et la boussole me le confirme. Eh bien, il va falloir encore remonter après cette descente... Effectivement, peu après avoir rejoint le sentier qui monte au Col Garnier (que j'emprunterai au retour), ça remonte. Encore 150 m de dénivelée à grignoter mètre après mètre. Encore de nombreux arrêts avant d'arriver aux Granges de Furfande et à son oratoire. Cette fois-ci, c'est fini, il n'y a plus qu'à continuer pratiquement sur la même courbe de niveau jusqu'au refuge de Furfande. Une pancarte indique 20 minutes, mais je mettrai encore une demi-heure avant d'arriver au refuge.
L'accueil est sympathique, mais le refuge est presque complet et je dois me contenter d'un couchage dans une petite mezzanine perchée au dessus de la porte de la chambre et accessible par une petite échelle bien raide. Douche chaude, lessive (qui sèche rapidement au grand air) et rédaction de mes impressions journalières devant un coca-cola bien frais. Un excellent repas est servi à 19 h. Il y a beaucoup de familles avec de très jeunes enfants, car le refuge est aussi accessible depuis le Col de Furfande (situé à 2500 m d'altitude) où on peut monter en voiture (théoriquement les alpagistes et propriétaires des chalets...). Ce soir, une grande famille avec enfants et petits-enfants fête un anniversaire et il y a de l'ambiance dans la salle à manger. Je sympathise avec un autre randonneur de 50 ans qui fait des petites balades autour du refuge, mais qui a fait beaucoup de montagne avec des guides en Vanoise. On a évoqué pas mal de sommets qu'on avait gravis dans une vie antérieure. Je me couche vers 21 h 30, mais je suis souvent réveillé et je suis obligé de descendre de mon perchoir à 4 reprises...

Hébergement : Refuge de Furfande      , 06 16 56 23 79, Laure et Michel Belin-Zalio.
J'ai mis "trois étoiles" car l'accueil est très sympathique, le refuge est neuf et les gardiens en sont les propriétaires. Mais j'en reparlerai un peu plus tard, car je n'ai vraiment connu l'histoire de cette famille qu'après être passé le 25 août au refuge de Basse-Rua qui est gardé par leur fille Gaëlle.

Repas : Potage potiron chataîgnes, sauté de veau aux haricots blancs, fromage, ananas frais. Excellent.
Tarifs 2016 : DP 48 € en chambre payables par chèque ou espèces. Réservation par téléphone. Pas d'arrhes. Coca-cola 3 €.
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau froide) où on peut faire la lessive (petit étendage extérieur trop limité). Par contre des coffres sur roulettes sous les lits seraient un plus pour le rangement. Couettes appréciées.
Téléphone : Free/Orange passe bien en sortant un peu. La 4G passe même à quelques centaines de mètres quand on est en vue directe de la station de Risoul 1850 au dessus de Guillestre.

Ravitaillement : PN à 10 €, mais j'en ai suffisamment pour les jours qui viennent, on verra donc plus tard.


15 août 2016

Refuge de Furfande – Souliers

Longueur étape : 21 km

Heure départ : 7 h 30

Heure d'arrivée : 15 h 40

Durée effective de marche : 6 h 50

Dénivelée cumulée : 2710 m

Déniv. positive : 1120 m

Déniv. négative : 1590 m

Alt min : 1745 m

Alt max : 2510 m

Itinéraire (794 Ko) - Profil (64 Ko)

7 h 30 – Refuge de Furfande, 2300m
8 h 05 – Col de Furfande, 2500 m
8 h 50 - Cabane du Plan du Vallon, 2025 m
9 h 15 - Pied de la Garduère, 1830 m
9 h 55 - Crête de l'Echelle, 1930 m
10 h 10 - Vallon de Combe Bonne, 1790 m
11 h 00 - Brunissard (pique-nique 50 minutes), 1750 m
13 h 20 – Le Pouit, 2220 m
14 h 15 – Lac de Souliers, 2492 m
15 h 05 - Ravin des Tegneytes, 2065 m
15 h 40 – Souliers, 1844 m

Météo :   toute la journée, canicule à Brunissard.

Le film de l'étape : Lever à 6 h 45, petit-déjeuner à 7 h et départ à 7 h 30.  Montée assez rapide dans l'ombre au Col de Furfande où je retrouve le soleil. Descente tranquille à la fraîche sur un bon sentier dans les alpages sous la surveillance d'un patou quand même. Je commence à bien les connaître et je n'en ai pas peur, mais au cours de ma randonnée, on m'a rapporté à plusieurs reprises qu'ici ou là des randonneurs avaient été mordus par des patous. Est-ce que ces randonneurs avaient montré de l'agressivité ou des gestes de défense ou encore de l'impatience, je n'en sais rien, mais dorénavant je vais me méfier un peu plus. Je rentre ensuite dans un superbe bois clairsemé avec des jeux d'ombre et de lumière étonnants et vers 1900 m, j'ai la surprise de rencontrer 3 biches. Elles me laissent quand même le temps de prendre quelques photos avant de disparaître. L'avantage de randonner seul, c'est que je peux me déplacer sans faire beaucoup de bruit et surprendre ainsi des animaux que j'aurais du mal à rencontrer si j'étais dans un groupe.
Petite pause à la Cabane du Plan du Vallon avant de poursuivre la descente jusqu'au pied de la Garduère où, après avoir traversé le Torrent du Champ la Maison, une remontée courte mais brutale dans des pierriers me fait passer la Crête de l'Echelle. Nouvelle descente très agréable dans la forêt jusqu'au Vallon de Bonne Combe. Ensuite, le sentier épouse les contours de la montagne et me conduit jusqu'à Brunissard sous un soleil caniculaire. Dans des trouées de verdure, j'aperçois Arvieux, puis La Chalp (et le gîte La Teppio où nous avions pris pension en 2008 avec Jacques) et de nombreux cyclistes à l'assaut du Col de l'Isoard. On est le 15 août et je pense que la route est réservée aux cyclistes qui veulent monter le col sans être importunés par les voitures, comme cela se fait de temps en temps dans les Alpes.
J'arrive à Brunissard à 11 h et comme il fait très chaud, je décide de pique-niquer à l'ombre sous un abri où il y a des tables, des bancs et une fontaine rafraîchissante. Je me mets à l'aise et en profite pour aérer mes pieds et mes chaussures. De nombreux cyclistes font un détour pour remplir leurs bidons, se tremper la tête dans le grand baquet sous la fontaine et même y plonger leurs jambes entièrement. Ça me donne l'occasion de discuter un peu avec eux et en fait ce sont tous des triathlètes qui font l'Embrunman, une course célèbre avec 3,8 km de natation sur le plan d'eau d'Embrun, 188 km de vélo en passant par le Col de l'Isoard (montée par Brunissard, descente vers Briançon, 5000 m de dénivelée) et 42,195 km de course à pied pour finir. J'en ai vu un à l'entrée de Brunissard qui n'était pas près de terminer. Il était allongé dans l'herbe et vomissait tripes et boyaux... C'est James Cunnama (Afrique du Sud) qui a gagné chez les hommes en 9 h 35 et Carrie Lester (Australie) chez les femmes en 10 h 46. Le premier français, Hervé Faure, a terminé 4ème à 29 minutes du premier et la première française, Charlotte Morel, a terminé seconde à seulement 2 minutes de la gagnante. Eh bien, avec la chaleur qu'il faisait ce jour là, chapeau !
Je ne repars qu'à 11 h 50 pour attaquer la longue et pénible montée vers le Lac de Souliers où de nombreux promeneurs et randonneurs en profitent pour bronzer tranquillement. Il me semble même qu'il y en a qui ne sont montés que pour cela (maillot de bain, crème solaire...). Il est vrai qu'on peut accéder au lac assez facilement depuis un parking à l'entrée de la Casse Déserte dans le Col de l'Isoard. Il reste alors un peu moins de 300 m de dénivelée pour arriver au lac. Mais ils n'ont pas monté les barbecues comme au Lac du Lauzet !
Descente assez tranquille, mais piégeuse, avec des graviers qui roulent sous les chaussures et qui nécessitent toute mon attention. J'arrive à Souliers à 15 h 40. A l'entrée du hameau, une petite chapelle consacrée à Saint Pierre avec un superbe cadran solaire signé Rémi Potey. Accueil sympathique au gîte. Je m'installe dans un grand dortoir à l'ancienne (avec des couvertures qui grattent), expédie rapidement la douche et ma lessive avant de m'attabler pour mes écritures quotidiennes devant une superbe tarte aux myrtilles (5 € quand même) et un coca-cola. Une inquiétude cependant : en prenant ma douche, j'ai ressenti une douleur au mollet gauche assez typique d'une déchirure musculaire. Pourtant, je n'ai ressenti aucune gêne aujourd'hui à la marche, que ce soit à la montée ou à la descente. Serait-ce une déchirure liée à la fatigue ? Je suis perplexe et je vais appliquer le principe de précaution dès ce soir : massage au Voltarène avec prise d'un demi anti-inflammatoire et de l'ésoméprazole. Je vais renouveler la prescription demain matin et éventuellement demain soir. Demain sera une journée test et ce serait vraiment dommage d'être obligé d'abandonner dès le départ.
Le repas est servi à 19 h 30, de bonnes choses et malheureusement de moins bonnes... Il y a trois couples de randonneurs ou randonneuses avec moi et chacun explique d'où il vient et où il va. Tout le monde me dit que je fais le tour du Queyras à l'envers (car il est décrit dans l'autre sens sur le topo-guide), mais la gardienne, Mélanie, explique que l'étape du lendemain est plus jolie lorsqu'on la fait dans mon sens, ce qui équilibre les choses. Coucher à 21 h 30 et nuit un peu plus tranquille que la veille.

Hébergement : Gîte Le Grand Rochebrune, , 06 12 90 07 07, 04 92 21 86 77, Mélanie Couval, accueil sympathique.

Repas : 2 parts de melon et jambon sec (excellent), sauté de bœuf aux légumes (viande dure, nerveuse, difficile à avaler), semoule de blé dur (type couscous), fromages locaux, fromage blanc avec de la crème de marrons. Vraiment pas terrible !
Tarifs 2016 : DP 39 € en dortoir payables en espèces, chèque ou CB. Réservation par téléphone. Pas d'arrhes. Coca-cola 3 €, tarte aux myrtilles (excellente) 5 €.
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, étendage extérieur, dortoir (style refuge de la Martin), pas de coffre pour ranger ses affaires, couvertures qui grattent.
Téléphone : Free/Orange passe assez bien sur la terrasse.

Ravitaillement : PN à 10 €, mais j'en ai suffisamment pour les jours qui viennent, on verra donc plus tard.


16 août 2016

Souliers – Les Fonts de Cervières

Longueur étape : 18 km

Heure départ : 8 h 20

Heure d'arrivée : 15 h 50

Durée effective de marche : 6 h 30

Dénivelée cumulée : 2420 m

Déniv. positive : 1300 m

Déniv. négative : 1120 m

Alt min : 1844 m

Alt max : 2629 m

Itinéraire (724 Ko) - Profil (68 Ko)

8 h 20 - Souliers, 1844 m
9 h 50 - La Cuche (embranchement avec la variante du GR 58), 2270 m
10 h 25 - Bergerie Haute de Péas, 2340 m
11 h 15 - Col de Péas, 2629 m
12 h 15 - Ravin de Chalmettes (embranchement vers le Lac des Cordes), 2200 m
13 h 30 - Col des Marsailles, 2601 m
13 h 50 - Lac des Cordes (pique-nique 40 minutes), 2446 m
14 h 55 - Câbles, 2180 m
15 h 20 - Parking de "Les Chalps", 1960 m
15 h 50 – Refuge des Fonts, 2035 m

Météo : le matin,  l'après-midi,   fortes averses de 17 h à 20 h.

Le film de l'étape : Lever à 7 h, massage et anti-inflammatoire. Pas d'évolution depuis la veille, mais une grosse rougeur me fait aussi penser à une piqûre d'insecte. Le test va avoir lieu aujourd'hui. Je ne vais pas forcer et écouter mon mollet, on verra bien ce soir. Petit-déjeuner à 7 h 40 (mais avec du bon pain frais, de quoi se racheter de la viande immangeable d'hier soir) et départ à 8 h 20. Montée agréable dans une belle forêt, puis dans des alpages vers le Col de Péas. J'en profite pour faire une bonne pause et manger une barre de céréales, car je ne veux pas déjeuner avant le Lac des Cordes. J'attaque la descente vers l'embranchement qui mène au lac (variante GR 58) où j'arrive une heure plus tard. Et puis 300 m après le début de cette variante, je découvre un raccourci qui m'aurait évité de descendre jusqu'à l'embranchement. Il est balisé dans le sens Lac des Cordes - Col de Péas, mais pas dans l'autre sens. A titre indicatif, je l'ai indiqué par un trait rouge sur la carte de l'itinéraire. Ce n'est pas bien grave, j'aurais peut-être gagné 8 à 10 minutes, pas plus.
La pancarte indique Lac des Cordes 55 minutes, mais j'en doute fortement. Avant d'arriver au lac, je dois d'abord franchir le Col des Marsailles à 2601 m d'altitude, puis redescendre au lac à 2446 m, soit au moins 400 m de dénivelée positive et 150 m de dénivelée négative. Je n'ai rien d'un triathlète et je continue sans forcer. Pour l'instant, je n'ai pas senti mon mollet et c'est plutôt bon signe. Au Col des Marsailles, je sais qu'il n'y a plus qu'à redescendre et je vais pique-niquer au Lac des Cordes tout proche. Il est quand même 13 h 50 et je commence à avoir faim. Je m'installe confortablement face au lac à l'ombre d'un gros rocher (mais il n'y a plus beaucoup de soleil) et je me mets les pieds à l'air. Il y a beaucoup de monde autour du lac, en particulier des familles avec des enfants. Il y a en effet un parking à "Les Chalps", 500 m plus bas (en dénivelée), et on peut faire une jolie boucle par le refuge des Fonts. En fait, je fais une grosse partie de la boucle à l'envers, encore une fois...
La descente que je craignais un peu s'avère facile dans des alpages agréables, même si une partie câblée sans difficulté ralentit la progression avant d'arriver au fameux parking dont j'ai parlé précédemment. Dans la descente, j'ai croisé un groupe de jeunes soldats qui montaient en courant vers le lac. Enfin, les premiers courraient et les derniers marchaient. Ils étaient en short, tee-shirt et chaussures de training. Pas de treillis, de casque, ni de fusil mitrailleur... Les temps ont bien changé, tant mieux pour eux ! Dans la vallée, il ne me reste qu'un km 500 de piste ombragée pour arriver au refuge des Fonts et je croise les premiers soldats qui terminent leur boucle en revenant vers le parking.
J'arrive au refuge à 15 h 50. Accueil sympathique, mais sommaire, le patron étant très occupé avec les touristes qui envahissent sa terrasse. La route monte en effet jusqu'ici. Le dortoir est minuscule et je le partage avec un autre randonneur, Alain d'Auxerre. Par chance, je suis arrivé le premier et j'ai choisi une couchette, qu'on pourrait appeler "matrimoniale", car elle fait bien 1,40 mètre de large. Douche chaude et lessive avec de l'eau chaude dans une dépendance du refuge. Il paraît que le patron possède quasiment tout le hameau ! J'étends mon linge et m'apprête à rédiger mes impressions quand une petite averse survient. Je mets le nez dehors et constate que le fond de la vallée est complètement bouché et que la pluie arrive. Je rapatrie aussitôt mes affaires dans le dortoir où je tends ma corde à linge. Il était temps, il va pleuvoir à verse jusqu'à 20 h. J'espère que ça va sécher d'ici demain malgré une humidité très nette. Enfin, je pourrai toujours passer la carline et les chaussettes cette nuit pour qu'elles finissent de sécher sur moi. Espérons que cette bonne averse va purger le ciel et apporter du beau temps pour demain. Je propose à Alain de partager ma corde à linge car il reste de la place, mais il n'a pas grand chose à faire sécher. J'ai constaté que peu de randonneurs faisaient leur lessive tous les soirs et pourtant c'est très agréable de repartir dans des vêtements propres et ça évite les démangeaisons et les mycoses. Enfin, chacun fait comme il veut. Il paraît qu'au bout de quelques jours, on ne sent plus rien, même si on ne se lave pas...
Je retourne dans la salle à manger et déguste un gâteau au chocolat avec un coca-cola en reprenant mes écritures. Le repas est servi à 19 h 30, classique mais bon. Pendant le repas, je discute beaucoup avec Alain, ce qui est facile car on est tous les deux, seuls à la même table. Il est passionné par le Queyras et d'autres régions comme les Pyrénées. Il arrive de Le Roux d'Abriès où je vais demain. J'ai donc des informations de première main sur l'étape assez dure qui m'attend et, comme il va à Souliers, je l'incite à faire le détour par le Lac des Cordes.
Je suis rassuré sur l'état de mon mollet qui ne m'a absolument pas gêné aujourd'hui et je penche maintenant pour une piqûre d'insecte car la rougeur est assez importante. La douleur à la palpation ira progressivement en diminuant et je l'aurai complètement oublié dans quelques jours. Demain petit-déjeuner à 6 h 30 et ça m'arrange bien. Je vais partir le plus tôt possible car je sais que je ne vais pas rencontrer grand monde demain et je pourrai ainsi voir venir si des difficultés surviennent. Coucher vers 21 h 30.

Hébergement : Refuge des Fonts de Cervières, , 04 92 21 32 82, Gilbert Faure, accueil sympathique, mais sans plus.

Repas : Potage classique, sauté de veau, riz, salade, fromage, crème brûlée. Repas classique sans originalité, mais bon.
Tarifs 2016 : DP 42 € en dortoir payables en espèces ou chèque. Réservation par téléphone. Pas d'arrhes. Coca-cola 3 €, pâtisserie 4 €.
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, étendage extérieur, dortoir exigü (style refuge de la Martin), pas de coffre pour ranger ses affaires, couvertures qui grattent.
Téléphone : Free/Orange ne passe pas.

Ravitaillement : PN à 10 €, mais j'en ai encore suffisamment pour les jours qui viennent, on verra donc plus tard.


17 août 2016

Les Fonts de Cervières - Le Roux d’Abriès

Longueur étape : 17 km

Heure départ : 7 h 15

Heure d'arrivée : 15 h 15

Durée effective de marche : 7 h 00

Dénivelée cumulée : 2590 m

Déniv. positive : 1150 m

Déniv. négative : 1440 m

Alt min : 1737 m

Alt max : 2921 m

Itinéraire (688 Ko) - Profil (65 Ko)

7 h 15 – Refuge des Fonts, 2035 m
9 h 45 - Col du Petit Malrif, 2830 m
10 h 10 - Pic du Malrif, 2906 m
10 h 20 - Col du Malrif, 2866 m
11 h 35 - Les Costetes, 2800 m
12 h 00 - Col de Rasis, 2921 m
12 h 30 - Col des Thures (pique-nique 40 minutes), 2797 m
14 h 35 - La Montette, 1930 m
15 h 15 - Le Roux d'Abriès, 1737 m

Météo : toute la journée. Temps plus frais et plus agréable, tendance orageuse l'après-midi, mais sans précipitations.

Le film de l'étape : Lever à 6 h 15, petit-déjeuner tranquille à 6 h 30 et départ à 7 h 15. Le sentier est assez dégradé par les averses d'hier soir et l'eau ruisselle de partout. Peu après le départ, je rencontre des concrétions calcaires de tuf comme celles que j'avais découvertes en 2013 dans le Vercors avant d'arriver à Pont-en-Royans. Je traverse de grands alpages et je dois encore attendre 8 h 30 avant que le soleil ne vienne me réchauffer. J'en profite pour faire une pause et ôter ma micropolaire. Quatre randonneurs sont devant moi et je les rejoins alors qu'ils ont sorti un solide casse-croûte et les bouteilles qui vont avec. Ce sont manifestement des retraités de la région. Je les salue, espérant engager la conversation, mais ils sont trop absorbés dans leurs discussions... Je pense qu'ils vont me rattraper avant d'arriver au Col du Petit Malrif, mais ils prennent une autre direction en coupant dans les alpages. Ils vont peut-être chercher du génépi et préfèrent garder leurs secrets !
J'arrive au col à 9 h 45. La vue est superbe sur le Lac du Grand Laus en contrebas, mais ce n'est pas mon objectif aujourd'hui. Je fais une pause prolongée et mange une barre de céréales, car je voudrais pique-niquer au Col des Thures juste avant de redescendre et il n'est pas tout près. De cette façon, si le mauvais temps arrive dans le courant de l'après-midi, je ne serai plus sur les crêtes. Je monte au Pic du Malrif et continue vers le Col du Malrif. Des moutons paissent en contrebas et j'aperçois des patous et des chiens de berger. Ce dernier ne doit pas être bien loin. Au Col du Malrif, je rencontre un gars du pays qui est monté directement à travers des pentes raides et qui voulait aller au Grand Glaiza. C'est un parcours de crête assez facile, mais il hésite à cause des risques d'orage. Il a déjà été pris par le mauvais temps dans ces parages et il en garde un mauvais souvenir. Ce n'est pas fait pour me rassurer, mais pour l'instant il ne semble pas y avoir de risques. Il décide de continuer un peu vers le Col de Rasis, ce qui m'arrange car c'est là où je vais et il me suffira de le suivre. Mais au bout de 5 minutes, il change d'avis et monte dans un pierrier. Il cherche peut-être du génépi lui aussi...
Je continue donc seul et je ne rencontrerai qu'un randonneur britannique sous le Col de Rasis. Descentes délicates dans des pierriers instables, longues traversées vers les Costetes (où le balisage est un peu léger), grands moments de solitude... Et puis après un rude sentier tracé dans une barre schisteuse, j'arrive à un joli petit lac caché dans un repli de terrain sous le Col de Rasis. Dernier coup de rein et j'arrive au col, point culminant de cette journée. Je ne m'arrête pas car le Col des Thures n'est qu'à une demi-heure et je l'atteins rapidement par une belle traversée descendante et un petit parcours de crête. Il est 12 h 30 et j'ai bien marché. Le temps est toujours au beau et je m'installe pour un pique-nique prolongé avec aération des pieds et des chaussures. En fait, entre le Col de Rasis et le Col des Thures, je suis passé en Italie sans m'en rendre compte. Avant de repartir, je photographie sous toutes ses coutures la borne frontière n° 40 qui marque mon retour en France.
Il me reste encore 1000 m de dénivelée à descendre pour rejoindre le gîte. Le sentier est agréable au soleil et traverse des alpages jusqu'à la chapelle de La Montette, consacrée à Marie Madeleine, bien restaurée mais fermée. Le hameau de La Montette était encore habité jusqu'à la fin du XIXème siècle, mais détruit à plusieurs reprises par des avalanches, il a finalement été abandonné par ses habitants.
Un peu plus bas, je rencontre un superbe troupeau de vaches de race gasconne avec leurs veaux et un énorme taureau dont on n'est séparé que par un petit fil électrique... Le site internet de France-Génétique-Elevage m'apprend que "La Gasconne est issue des coteaux et des régions montagneuses des Pyrénées. Elle est aujourd’hui utilisée pour sa rusticité et ses qualités maternelles, qui ont fait sa réputation. La dureté de ses onglons et la solidité de ses aplombs lui permettent en particulier d’évoluer facilement sur tous les types de sols, même les plus escarpés. De plus, son poil dense et court et ses muqueuses noires la rendent résistante aux grandes amplitudes de température. Ces caractéristiques, alliées à des facilités de vêlage indéniables et à une bonne capacité à supporter l’alternance des régimes alimentaires, en font la reine des estives durant l’été". La patronne du gîte m'a dit que le troupeau comptait plus de 80 vaches.
J'arrive dans le village un peu après 15 h. Joli cadran solaire au fronton du clocher. Il n'y a personne au gîte, mais le tableau d'affichage m'indique dans quel dortoir je peux m'installer. Mon compagnon d'hier soir m'avait prévenu. Je m'installe, prends ma douche, fait ma lessive et lorsque les patronnes arrivent (le gîte est géré par trois jeunes femmes), je m'installe devant une bonne tarte aux pralines et un coca-cola pour rédiger mes impressions journalières. Comme le téléphone passe bien, j'en profite pour donner de mes nouvelles à toute la famille, même si le portable n'arrive pas très bien jusqu'à Trescléoux où se trouve Elisabeth et maman. Le dortoir n'est occupé que par deux autres randonneuses et on a donc de la place. Surprise, j'ai déjà rencontré ces deux jeunes femmes à Souliers. Elles vont d'un gîte à un autre en voiture et randonnent tout autour. Echanges intéressants à table avec un autre couple d'une cinquantaine d'années qui va faire dans l'autre sens une grande partie de l'étape que je viens de faire. Comme l'homme craint les sentiers un peu "gazeux", je le rassure en lui montrant des photos du parcours.  Après un excellent repas, je vais me coucher vers 21 h 30 après avoir insisté auprès de Dominique (la patronne du gîte) pour pouvoir déjeuner un peu plus tôt que les autres. Demain, je passe en Italie et une longue étape m'attend.

Hébergement : Chalet-Gîte Le Cassu,     , 04 92 46 74 30, 06 82 48 09 99, Dominique Sabatier, accueil très sympathique.

Repas : cake aux légumes, salade, goulash, purée, gâteau au chocolat. Excellent repas.
Tarifs 2016 : DP 43 € en dortoir, payables en espèces, chèque et CB. Réservation par internet. Arrhes 10 €. Coca-cola 3 €, tarte aux pralines 4,50 €.
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, étendage dans une arrière cour pas très pratique, dortoir classique un peu vieux jeu, pas de coffre pour ranger ses affaires, couettes.
Téléphone : Free/Orange passe bien.

Ravitaillement : PN à 10 €, mais j'en ai encore suffisamment pour les jours qui viennent, on verra donc plus tard.


18 août 2016

Le Roux d’Abriès – Refuge Granero

Longueur étape : 20 km

Heure départ : 7 h 30

Heure d'arrivée : 15 h 30

Durée effective de marche : 7 h 00

Dénivelée cumulée : 2490 m

Déniv. positive : 1560 m

Déniv. négative : 930 m

Alt min : 1710 m

Alt max : 2525 m

Itinéraire (788 Ko) - Profil (64 Ko)

7 h 30 –  Le Roux d'Abriès, 1737 m
8 h 25 – Près du Bois de la Brune (intersection avec le GR 58 Tour du Queyras), 1990 m
9 h 55 - Bergerie sous Roche, 2280 m
10 h 40 - Col d'Urine (borne frontière 45), 2525 m
12 h 30 - Refuge Jervis (pique-nique 30 minutes), 1732 m
13 h 30 - Au fond de la vallée au pied de la montée au refuge, 1745 m
14 h 35 - Pian Sineive (stèle commémorative du crash d'un avion américain en juillet 1957), 2060 m
15 h 30 - Refuge Granero, 2377 m

Météo : alternance de  et de  , rares éclaircies.

Le film de l'étape : Lever à 6 h 45 et petit-déjeuner à 7 h. Je déjeune avec le couple rencontré hier soir à qui j'ai montré les photos de l'étape qui les attend. Ce sont de gros fumeurs et ils ont déjà une cigarette à la bouche. Je leur fais gentiment remarquer qu'ils doivent certainement le payer en montagne et ils en sont bien conscients. Ils veulent arrêter, mais quand...
Départ à 7 h 30 par une courte descente vers le Torrent du Bouchet avant une montée tranquille et agréable dans une belle forêt, puis dans des alpages en direction de la Crête de Gilly. Ensuite un sentier balcon bien reposant tracé le long d'un ancien canal d'irrigation (comme les levadas à Madère ou les bisses dans le Valais en Suisse) me conduit à la Bergerie sous Roche où je regarde un berger rassembler son troupeau et faire travailler ses chiens avant de partir dans les alpages. Montée agréable et tranquille au Col d'Urine, mais avec un vent froid dans le dos si bien que je me demande si je ne vais pas remettre ma micropolaire. Mais le col est maintenant tout proche et je pense que je serai à l'abri du vent sur l'autre versant.
Je rencontre au col un groupe d'une quinzaine de randonneurs qui arrivent d'Italie et semblent frigorifiés. Certains ont mis tout ce qu'ils avaient : cagoule, bonnet, gants et doudoune. Quelques uns sont bien fatigués et ils vont tous s'installer un peu plus loin avec leur guide sans dire un mot. Je rattrape également un autre groupe qui me précédait, deux familles avec des enfants guidés par un accompagnateur. Ils se sont installés à l'abri du vent côté italien et se partagent quelques biscuits. Je m'arrête un peu plus bas et me construit un siège rustique avec quelques pierres plates. A cause de mon dos, je déteste m'asseoir directement sur le sol et je n'hésite pas à poursuivre mon chemin si je ne trouve pas un endroit approprié. Bonne surprise, le temps est beau et c'est tant mieux. Je craignais en effet de faire connaissance avec la célèbre "nebbia", ce brouillard si fréquent en Italie autour du Viso. Je mange une barre de céréales avant d'entamer la descente vers le refuge Jervis, car je sais que l'étape sera longue.
Le sentier est raide, parfois glissant, mais pas trop difficile. Pendant une heure, je vais évoluer dans un univers minéral très accidenté : pierriers, gros blocs, petites gorges, torrent... Et puis je retrouve les alpages où je rencontre un gros troupeau de moutons au détour du sentier. Quelques chèvres avec de jolies cloches les accompagnent. J'arrive enfin au refuge Guglielmo Jervis vers 12 h 30. C'est une construction de maçonnerie en pierre dédié à Willy Jervis, ingénieur et vice-président du Club Alpin Italien d'Ivrea, qui a été abattu par les SS à Villar Pellice le 5 août 1944. A l'origine, c'était une caserne dans la zone de frontière avec la France. Après la guerre, la caserne a été donnée en gestion au CAI d'Ivrea, qui l'a transformée en refuge. Aujourd'hui, c'est la fête avec un trail haut en couleurs qui rassemble beaucoup de monde. Les derniers coureurs arrivent les uns après les autres et viennent chercher leur médaille de "finisher" devant le refuge. Il semble (mais je n'en suis pas sûr) que le parcours passe par les refuges Willy Jervis, Granero et Barbara Lowrie. Je pique-nique rapidement à l'ombre d'une vieille maison car il ne fait pas bien chaud et je repars vers 13 h. Quelques nuages de nebbia font leur apparition, mais ils ne restent pas bien longtemps.
Je remonte la vallée du Val Pellice par un long chemin empierré et je rencontre des militaires italiens à qui je me fais préciser l'itinéraire vers le refuge Granero, car je n'ai pas la carte détaillée de mon parcours en Italie. Au fond de la vallée, je repère le sentier qui mène au refuge et, une heure plus tard, j'arrive au Pian Sineive où un avion américain s'est écrasé le 21 juillet 1957. On peut voir encore des débris de l'appareil : hélice, éléments de train d'atterrissage, moteur... près de la stèle érigée en mémoire des 9 victimes. Je repars et aperçoit le refuge d'hiver sur la crête, mais il me faudra encore une petite heure avant d'y arriver. Je rattrape un randonneur assez âgé et manifestement fatigué qui se repose en regardant un troupeau de moutons sur le versant opposé. J'essaie d'échanger quelques mots avec lui, mais il est italien, il ne comprends pas bien le français et il n'a pas trop envie de parler. Son compagnon est déjà arrivé au refuge lorsque j'y arrive à mon tour à 15 h 30. Je suis vraiment content, car je redoutais un peu cette étape et tout s'est bien passé.
Accueil sympathique du gardien qui parle français et installation dans un coin tranquille du grand dortoir. Je prends ma douche, un peu froide au début, et j'en profite pour essayer de laver une partie de mon linge tant qu'il reste de l'eau chaude. Pour prendre une douche dans les refuges italiens, il faut introduire un jeton dans un monnayeur qui vous attribue entre 15 et 20 litres d'eau chaude qu'on peut utiliser comme on veut. Il n'y a pas de limite de temps. Bien sûr, c'est payant sauf si c'est compris dans le forfait de la demi-pension. Lorsque le gardien m'a fait ma note le lendemain, il m'a dit qu'il ne me faisait pas payer la douche, car il avait dû remplacer la bouteille de gaz qui était pratiquement vide, ce qui explique que l'eau était un peu fraîche au départ. Je termine ma lessive à l'eau froide et l'étend sur un étendage extérieur où il y a beaucoup de place. Il y a une bonne dizaine de randonneurs ce soir là et je suis encore le seul à faire ma lessive...
Je déguste une bonne part de gâteau au chocolat avec un coca-cola et je rédige comme d'habitude mes impressions journalières. Et puis je vais visiter le Lago Lungo, un grand lac tout en longueur caché derrière le refuge, qui n'est pas sur mon itinéraire du lendemain. Comme il ne fait pas très beau, au bout d'un moment, je rentre mon linge et tend ma cordelette entre les montants de mon lit. Il finira de sécher pendant la nuit. Il y a pas mal d'italiens ce soir et je prends un excellent et copieux repas à la table d'une famille française, un couple et ses deux enfants, originaires d'Evreux, qui randonne dans le Queyras pendant une quinzaine de jours. C'est la première fois qu'ils passent la nuit en refuge avec les enfants. Le père porte le petit de 3 ans dans un sac à dos et l'aîné de 9 ans marche comme un grand. Il a quand même fait pratiquement 1000 m de dénivelée aujourd'hui et il en est fier.
Avant d'aller me coucher, je discute avec le patron de mon itinéraire du lendemain. Il m'explique qu'un nouveau sentier beaucoup plus intéressant a été récemment créé entre le Col d'Armoine et le pied du Col de la Traversette. Economie de dénivelée et de distance. Ça m'intéresse vivement et je vais suivre son conseil. Il préviendra Marythé et les sauveteurs de mon changement d'itinéraire si par hasard je n'étais pas au refuge du Viso demain soir. Je vais me coucher vers 21 h 30 comme d'habitude. Demain, c'est une étape "tranquille" et je déjeunerai à 7 h 30.

Hébergement : Refuge Granero,   , 0039 0121 91 760, accueil très sympathique, 

Repas : Amuses-gueules (saucisson, poivrons, baguettes de sésame), pâtes, rôti de porc, polenta, crème catalane. Excellent repas  et copieux, car les deux enfants mangent moins que les adultes et on en a profité.
Tarifs 2016 : DP 45 € en dortoir payables en espèces. Réservation par téléphone. Pas d'arrhes. Coca-cola 2 €, pâtisserie 2,50 €.
Commodités : Douche chaude payante, lavabos (eau froide) où on peut faire la lessive, étendage vaste et très pratique, dortoir classique mais lits récents, pas de coffre pour ranger ses affaires, couvertures siglées du refuge qui ne "râpent" pas, toilettes à la turque mais avec "poignée de relevage".
Téléphone : Free/Orange ne passe pas.

Ravitaillement : PN à 10 €, mais j'en ai encore assez pour demain. On verra au refuge du Viso.


19 août 2016

Refuge Granero - Refuge du Viso

Longueur étape : 11 km

Heure départ : 8 h 20

Heure d'arrivée : 15 h 10

Durée effective de marche : 6 h 00

Dénivelée cumulée : 2020 m

Déniv. positive : 1050 m

Déniv. négative : 970 m

Alt min : 2377 m

Alt max : 2950 m

Itinéraire (368 Ko) - Profil (61 Ko)

8 h 20 – Refuge Granero, 2377 m
9 h 30 – Colle Manzol, 2694 m
11 h 55 – Colle Armoine, 2690 m
12 h 20 - Pied du Col de la Traversette (pique-nique 30 minutes), 2688 m
13 h 15 - Tunnel de la Traversette, 2840 m
13 h 40 - Col de la Traversette, 2950 m
15 h 10 - Refuge du Viso, 2460 m

Météo : toute la journée, excepté au pied du Col de la Traversette.

Le film de l'étape : Lever à 7 h 15, petit-déjeuner tranquille à 7 h 30 et départ à 8 h 20. Je fais quelques détours pour admirer de haut le Lago Lungo et prendre quelques photos. Au Colle Manzol, je retrouve mes deux randonneurs italiens (celui que j'avais dépassé avant d'arriver au refuge et son compagnon) qui vont redescendre vers le refuge Jervis où ils ont laissé leur voiture. Finalement le plus âgé parle quelques mots de français. On se prend en photo réciproquement et on se souhaite bonne chance. Du col, on voit bien le Lago Nero et le Lago Gelato, en le cherchant un peu, car il est tout petit et caché au pied du Monte Granero (3170 m). Apparemment, c'est un sommet intéressant et il semble bien qu'un sentier y mène, même s'il faut peut-être mettre les mains dans quelques passages. Bon, il n'était pas à mon programme cette fois-ci.
La montée au Colle Manzol était facile, la descente le sera moins. Le sentier tracé dans la falaise est sécurisé par des chaînes (qui ne servent guère) et il débouche ensuite dans un couloir d'avalanche d'où descendent parfois quelques pierres. Chamois, bouquetins, randonneurs ? J'attends que la mitraille cesse et descend rapidement en prévenant les autres randonneurs qui montent tranquillement. Un peu plus loin, je repère le sentier qui mène au Colle Armoine. Il traverse des alpages bucoliques qui incitent à la rêverie et au farniente. Montée tranquille et pause de 10 minutes au col pour manger une barre et me désaltérer.
C'est ici que démarre la variante que m'a suggérée le gardien du refuge hier soir. Elle est très bien indiquée et je l'emprunte à la suite de 3 randonneurs italiens d'une trentaine d'années. Je pense qu'ils vont me semer rapidement, mais ils font des pauses prolongées et l'un d'entre eux est littéralement tétanisé dans un passage où des chaînes complètement inutiles ont été installées. Il faut même parfois les enjamber pour poursuivre son chemin. Inutile de dire que je ne m'en suis même pas servi. Ce nouveau sentier balcon grimpe au flanc de la montagne et rejoint par une brèche le sentier classique qui monte de Pian Mait di Viso. Je rencontre mes premières édelweiss et j'arrive au pied du Col de la Traversette vers 12 h 20. Il ne fait pas très beau, un peu de brouillard depuis le Colle Armoine, mais je trouve un bon endroit pour pique-niquer assez rapidement car je ne tiens pas à me refroidir. Je termine toutes mes provisions et demain je prendrai mon premier pique-nique au refuge du Viso.
Je repars sur un sentier bien tracé mais raide jusqu'à un vieux baraquement militaire de la dernière guerre, puis jusqu'au tunnel de la Traversette. Il a été creusé sous le col à la fin du Moyen-Age en moins de 2 ans pour relier le Piémont italien au Dauphiné. Long de 60 mètres environ, il permettait ainsi aux mulets chargés de marchandises (et notamment de sel) de passer la montagne plus aisément. On peut imaginer la difficulté pour creuser un tel passage à cette altitude et à cette époque ! Je traverse le tunnel vers la France, puis je reviens sur mes pas en Italie pour monter au Col de la Traversette où se trouve la borne frontière n° 47 sous la forme d'un rocher gravé. Petite pause pour admirer le paysage et descente du côté français où je retrouve la sortie (ou l'entrée) du tunnel.
En poursuivant vers le refuge du Viso, je rencontre mes premiers bouquetins qui prennent tranquillement le soleil sur une vire spacieuse à l'abri des importuns. La descente n'est pas facile car le sentier est bien encombré et casse-pattes au possible. J'arrive enfin au refuge à 15 h 10 où je prend mes quartiers. Accueil assez sympathique mais standard, c'est un peu l'usine, comme souvent dans les refuges du CAF. Douche rapide car l'eau est à peine tiède, je ne sais pas comment font ceux qui arrivent en fin de journée... Lessive difficile à l'eau glacée dans un lavabo sans bonde et avec un robinet poussoir. Je fais sécher mon linge sur l'étendage extérieur où il y a peu de place, mais un vent fort et chaud va faire le travail rapidement. Il faut toujours garder sa lampe frontale dans sa poche car il n'y a pas de lumière dans les dortoirs et les parties communes du refuge. Je me laisse tenter par une tarte aux myrtilles pas donnée (6 €) et un coca-cola et, comme d'habitude, je rédige quelques mots sur la journée qui s'achève. Les nuages sont partis et on peut admirer le Viso, le Col de Valante et la Pointe Joanne où j'espère monter dans 3 jours.
Le repas est servi à 19 h et je me retrouve avec un australien qui randonne assez souvent en France et deux allemands dont un parle très bien le français, car il a fait son service militaire comme objecteur de conscience pendant 6 mois dans une ONG à Arbois. C'était une pratique assez utilisée par les jeunes allemands pour en quelque sorte essayer de réparer les fautes commises par la génération précédente pendant la guerre. Discussions très intéressantes et je vais me coucher vers 21 h 30. Je me rendrai compte le lendemain que j'ai été piqué au bras droit probablement par des puces pendant la nuit. Un écriteau prévenait les randonneurs de bien utiliser leur sac à viande pour les éviter ! Le gardien aurait peut-être dû traiter ses vieilles couvertures avec un produit approprié comme cela se fait dans d'autres refuges.

Hébergement : Refuge du Viso, , 04 92 46 81 81, Sarah et Paul Cieslar, accueil assez standard.

Repas : Excellente soupe de légumes, pâtes, saucisse avec une sauce généreuse (tomates, poivrons...), fromage quelconque, petit dessert au chocolat.
Tarifs 2016 : DP 48,70 € en dortoir payables par chèque ou espèces. Réservation par internet, arrhes 10 €. Coca-cola 3 €, pâtisserie 6 €, pique-nique 10 €.
Commodités : Douche tiède, lavabos (eau froide, sans bonde, robinet poussoir) où on peut faire la lessive, étendage extérieur limité, dortoir classique, pas de coffre pour ranger ses affaires, vieilles couvertures avec des puces, pas de lumière dans les dortoirs et les parties communes, prestations assez chères.
Téléphone : Free/Orange ne passe pas.

Ravitaillement : PN à 10 € (salade de blé et d'autres choses, sandwich fromage jambon, compote) pas vraiment copieux et assez cher.


20 août 2016

Refuge du Viso - Refuge Quintino Sella

Longueur étape : 13 km

Heure départ : 7 h 40

Heure d'arrivée : 15h 15

Durée effective de marche : 6 h 30

Dénivelée cumulée : 2100 m

Déniv. positive : 1140 m

Déniv. négative : 960 m

Alt min : 2022 m

Alt max : 2920 m

Itinéraire (376 Ko) - Profil (66 Ko)

7 h 40 - Refuge du Viso, 2460 m
9 h 15 - Col du Couloir du Porc, 2920 m
10 h 00 - Refuge Giacoletti (café 15 minutes), 2739 m
11 h 00 – Intersection vers le Lago Superiore, 2425 m
12 h 00 - Source du Pô à Pian del Re, 2022 m
12 h 30 - Lago Fiorenza (pique-nique 30 minutes), 2133 m
13 h 25 - Lago Chiaretto, 2310 m
15 h 05 - Colle del Viso, 2650 m
15 h 15 – Refuge Quintino Sella, 2640 m

Météo : jusqu'à 9 h 30, jusqu'à 10 h, jusqu'à 14 h 30, jusqu'à 15 h, ensuite jusqu'au soir.

Le film de l'étape : Lever à 6 h 40, petit-déjeuner à 7 h et départ à 7 h 40. Le Viso a mis son bonnet d'âne comme le Mont-Blanc parfois. En général, c'est un signe de dégradation des conditions météo. Pour l'instant le ciel est encore bleu et je pars sans perdre de temps, car je voudrais bien passer la principale difficulté, le col du Couloir du Porc, avant l'arrivée éventuelle du mauvais temps. J'arrive 40 minutes plus tard au Lac Porcieroles vers 2640 m. Le ciel se charge du côté italien. Devant moi, des pierriers et une muraille où j'ai du mal à imaginer un passage. Je sors même la boussole pour deviner où se trouve ce fameux couloir. De toute façon, je n'ai pas d'inquiétude particulière, car c'est très bien balisé, mais j'aime bien savoir où je vais.
Au bout de quelques minutes, je suis fixé. Devant moi, le sentier se fraye un passage dans un couloir sombre et pentu au milieu des éboulis dans une faille étroite entre la Pointe d'Udine et la Pointe de Venise. J'aperçois deux randonneurs qui descendent prudemment. A partir de maintenant, je suis seul et ça me rassure car je crains les chutes de pierres dans un couloir aussi délicat. Le sentier est assez bien tracé, même s'il faut parfois enjamber quelques gros blocs et faire attention à ne pas glisser sur les petits cailloux qui encombrent le passage. Je ne suis pas très loin du sommet lorsque j'entends des voix un peu plus haut. C'est un guide (ou un accompagnateur) avec deux clients qui descendent vers le refuge du Viso. Je me décale pour ne pas rester sur la trajectoire des cailloux qu'ils pourraient déloger par maladresse et me dépêche d'arriver à leur hauteur. Le guide n'a que son sac à dos, mais les clients ont chacun un casque et deux piolets accrochés au dos du sac. La femme est particulièrement maladroite ou tétanisée par la situation, car elle n'avance que très lentement, assurée pas à pas par son guide. Je n'ai pas l'impression qu'elle ait déjà fait de la haute montagne, ou alors, si elle s'est servie de ses piolets, ce devait être sur un glacier pratiquement plat. C'est peut-être un test que le guide lui fait passer avant de monter au Viso, mais à mon avis, il ne va pas l'emmener bien loin.
J'arrive au col du Couloir du Porc à 9 h 15 à 2920 m. Mon intention première était de monter à la Pointe d'Udine (40 minutes aller et retour) pour profiter du panorama, mais le temps est maintenant bien bouché et les nuages montent d'Italie en rangs serrés (la fameuse "nebbia"). Ma décision est vite prise. Je ne verrai pas grand chose au sommet et de toute façon l'important maintenant c'est de descendre rapidement pour éviter d'être coincé sur les crêtes en cas d'aggravation des conditions météo. De plus, la descente me semble encore plus délicate que la montée. On aperçoit une faille étroite et sombre où on peine à imaginer qu'un sentier y a été tracé. C'est quand même très impressionnant et ce n'est manifestement pas un endroit où emmener des débutants. Je sais que des câbles ont été installés presque jusqu'au refuge Giacoletti à 2739 m et je m'engage dans la descente sans état d'âme. Il me reste 180 m de dénivelée à faire pour y parvenir. Le sentier emprunte un système de vires câblées avec des chaînes ou des cordes auxquelles on s'accroche comme dans une via ferrata, sauf qu'on a pas de ligne de vie, de baudrier, ni de longe pour s'assurer. Le balisage est presque redondant parfois, mais c'est bien appréciable dans les nuages. Il faut rester lucide, ne pas se précipiter et bien regarder où on va mettre les pieds et les mains dans chaque passage. J'ai quitté le col depuis un quart d'heure environ, lorsqu'une petite pluie fine se met à tomber. Je n'ai pas la place pour poser mon sac à dos et mettre ma cape de pluie ou mon goretex. De toute façon je suis persuadé qu'elle me gênerait plus qu'autre chose dans cette situation. Une seule solution, continuer en accélérant un peu le mouvement pour essayer d'arriver au refuge avant que la situation ne se dégrade davantage.
Dans le bas de la descente, de gros cercles rouge et blanc indiquent les points de passage et j'aperçois finalement le refuge dans une trouée au moment où la pluie cesse miraculeusement. J'en profite pour faire une bonne pause et prendre un café italien au bar du refuge. En fait je commande par la fenêtre à droite de l'entrée et je consomme dehors car je n'ai pas le temps de me déchausser pour entrer dans la salle à manger. Le café est excellent et me redonne le moral. Je sors quand même ma cape de pluie et la porte à la ceinture pour pallier à toute éventualité et je repars dans les nuages !
Un peu plus bas, le temps s'éclaircit et je rencontre la Salamandre de Lanza qui est de sortie par ce temps  pluvieux. Internet m'apprend que "cette espèce endémique se rencontre de 1200 à 2200 m d'altitude aux environs du Mont Viso en Italie et dans la haute vallée du Guil dans les Hautes-Alpes en France. La salamandre est active tôt le matin alors que le taux d'humidité au sol et dans l'atmosphère est encore élevé. Après l'accouplement, le développement embryonnaire des larves s'effectue dans l'utérus de la femelle sur une durée de quatre ans. Cette durée de gestation exceptionnellement longue s'explique par la limitation des échanges métaboliques du fait de la courte période d'activité de l'animal. La salamandre de Lanza se nourrit de petits invertébrés tels que limaces, insectes à carapace molle...". J'en rencontrerai plusieurs au cours de cette journée.
Comme le temps reste assez stable et qu'il ne pleut plus, je décide de faire la variante qui passe par le Lago Superiore et le Lago Fiorenza. D'après les récits que j'ai trouvé sur Internet, je pensais pouvoir couper vers le Lago Fiorenza après avoir longé le Lago Superiore. En fait, il n'y a pas de sentier à l'extrémité du lac et j'ai dû faire le grand tour jusqu'à Pian del Re où j'ai trouvé par hasard la source du Pô. Je ne savais pas qu'elle était par là et finalement, cette variante non prévue réserve quelques bonnes surprises. En montant au Lago Fiorenza, je suis à nouveau obligé de sortir la cape de pluie dans les nuages. Je ne sais pas trop où je vais pique-niquer quand j'aperçois à l'extrémité du lac un abri naturel et providentiel sous un gros rocher. Une pancarte proche m'indique que le refuge Quintino Sella n'est qu'à deux heures de marche et je décide de m'arrêter. Le pique-nique préparé par le refuge du Viso est vite avalé : salade composée, sandwich jambon fromage et compote. La pluie s'est à nouveau arrêtée et je repars.
La suite se déroule dans les nuages. Je ne vois pas grand chose, mais j'arrive à bien me situer sur la carte. Une éclaircie de courte durée me laisse entrevoir le Lago Chiaretto. Et puis j'aperçois la longue moraine sous le Colle del Viso que le sentier rejoint bientôt. C'est un amas de rochers, de blocs, de cailloux comme toutes les moraines, mais celle-ci est particulièrement imposante. Je vais me faufiler dans cet ensemble minéral pendant encore 40 minutes avant d'arriver au col. Mais entretemps la pluie est revenue et j'ai enfilé ma cape. Pour l'instant elle n'est pas bien gênante et je ne mets pas mon surpantalon. Je préfère arriver le plus tôt possible au refuge. J'arrive au Colle del Viso à 15 h 05. La pancarte indique "Refuge Quintino Sella 10 minutes" et j'accélère car la pluie s'intensifie maintenant. On ne voit qu'à une dizaine de mètres devant soi, je n'aperçois le refuge qu'au tout dernier moment et je termine en courant car c'est maintenant une bonne averse qui me tombe sur le dos.
C'est un refuge de haute montagne d'où partent les alpinistes qui vont faire l'ascension du Mont Viso par la voie normale. Inutile de dire qu'il sera bondé ce soir. Il y a une grande salle de séchage avec un système d'air chaud pulsé plutôt efficace. J'accroche ma cape de pluie toute dégoulinante et ôte mes grosses chaussures qui sont restées sèches. Je vais voir le gardien qui me donne le nom de mon dortoir et je m'installe. Je suis le premier, ce qui me permet de choisir ma couchette. Par contre, les douches sont à l'extérieur (peut-être pas très chaudes), je n'ai pas vraiment sué aujourd'hui et il fait un froid de canard. Je mets ma veste polaire pour me réchauffer. C'est la seule fois où je la mettrai pendant toute ma randonnée. Finalement je décide de ne pas prendre de douche et de ne pas laver mes vêtements aujourd'hui. Je le ferai demain au refuge de Valante lorsque le beau temps sera revenu puisque les prévisions météo sont plutôt optimistes. Je préfère rester à l'intérieur pour me réchauffer. Je sortirai quand même prendre quelques photos une heure après mon arrivée puisque la pluie s'est arrêtée.
C'est l'occasion de faire de nombreuses rencontres. Deux parmi d'autres : un groupe de randonneurs en liberté et Rudy avec son chien. Le groupe de randonneurs est composé de 6 personnes entre 40 et 60 ans, 4 femmes et 2 hommes. Ils sont particulièrement bruyants et se comportent comme s'ils étaient seuls dans le refuge. C'est assez désagréable et je ne suis pas sûr qu'ils donnent une bonne image de la France. Je discute un peu avec eux pour savoir quel est leur itinéraire. Ils font de la randonnée en liberté avec un fascicule qui leur indique le programme de chaque jour. Demain, ils vont aussi au refuge de Valante, mais heureusement ils ne suivent pas le même parcours que moi, ils ne sont pas dans le même dortoir et ils ne seront pas à la même table ce soir au dîner. Ils sont vraiment gonflants !
Rudy par contre est très sympathique. C'est lui qui m'a accueilli lors de mon arrivée au refuge. Il était dehors sur la terrasse sous un auvent avec son chien. On a fait connaissance pendant le repas car il était assis en face de moi. C'est un jeune niçois d'environ 25 ans qui travaille dans la ferronnerie. Il entretient une relation quasiment fusionnelle avec son chien et l'emmène partout (ou c'est le chien qui l'emmène). Il est venu de Nice pour deux jours et veut monter au sommet du Mont Viso avec son chien. C'est quand même une course d'alpinisme de niveau PD où il faut emporter un piolet, des crampons et une corde. Le gardien lui a dit qu'il n'arriverait jamais au sommet avec son chien. Demain, on fera quelques photos avant de se quitter.
J'ai montré mon itinéraire au gardien pour aller au refuge de Valante et je lui ai dit que j'ai prévu de passer par le Passo delle Sagnette et le Lago delle Forciolline. Il hausse un peu les sourcils, mais quand il me demande d'où je viens et que je lui dis que je suis passé par le Col du Couloir du Porc, il est rassuré. Il me conseille de passer par le sentier "Ezio Nicoli Monviso Sud" à partir du bivouac Boarelli plutôt que le sentier plus raide qui passe par le bivouac Berardo. De toutes façons, les deux sentiers se rencontrent peu avant d'arriver dans le vallon de Valante. Je vais donc suivre son conseil et lui dire de faire passer le message si je n'arrive pas au refuge de Valante, car j'avais prévu initialement de passer par le bivouac Berardo.
Je vais me coucher vers 21 h 30, pas encore bien réchauffé malgré ma polaire.

Hébergement : Refuge Quintino Sella, , 0039 0175 94 943, Hervé Tranchero, bon accueil mais c'est un peu l'usine comme dans beaucoup de refuges de montagne.    

Repas : Potage, omelette, pâtes, flan au chocolat. Repas correct mais pas très copieux.
Tarifs 2016 : DP 48 € en dortoir payables en espèces. Réservation par téléphone. Pas d'arrhes. Pique-nique 10 €.
Commodités : Douche à l'extérieur, lavabos (eau froide) où on peut faire la lessive, dortoir classique, pas de coffre pour ranger ses affaires, couvertures pas terribles, toilettes à la turque sans "poignée de relevage".
Téléphone : Free/Orange ne passe pas.

Ravitaillement : PN à 10 € : 3 tranches de pain, une minuscule tranche de fromage, une barquette de riz avec une olive et un demi champignon, une compote. La vie est chère en montagne, mais quand même ! Un des plus mauvais rapports qualité/prix.


21 août 2016

Refuge Quintino Sella - Refuge de Valante

Longueur étape : 10 km

Heure départ : 8 h 00

Heure d'arrivée : 15 h 00

Durée effective de marche : 6 h 00

Dénivelée cumulée : 1810 m

Déniv. positive : 810 m

Déniv. négative : 1000 m

Alt min : 2050 m

Alt max : 2991 m

Itinéraire (867 Ko) - Profil (61 Ko)

8 h 00 – Refuge Quintino Sella, 2640 m
8 h 55 - Début de la via ferrata du Passo delle Sagnette, 2820 m
9 h 30 - Passo delle Sagnette, 2991 m
10 h 10 - Caverne Michel Croz, 2863 m
10 h 35 - Bivouac Boarelli (pause 15 minutes), 2816 m
12 h 50 - Pique-nique (30 minutes), 2158 m
13 h 35 - Arrivée dans le vallon de Valante, 2050 m
15 h 00 - Refuge de Valante, 2450 m

Météo : toute la journée.

Le film de l'étape : Assez bonne nuit, malgré le lever à 4 h du matin de 3 alpinistes qui sont partis faire l'ascension du Monte Viso. Mais ils ont été très discrets et ça ne m'a pas trop gêné. De toute façon, j'ai le sommeil léger et je me réveille facilement. Je me lève à 7 h et descend déjeuner. Je sors admirer le lever du soleil et j'aperçois la lune quasiment pleine derrière le refuge. Je remonte en vitesse chercher mon appareil photo, mais elle s'est un peu déplacée entre temps. J'attends 5 minutes qu'elle soit en bonne position pour la mitrailler sans retenue. J'en profite pour demander à Rudy des nouvelles de son chien qui a dormi dans un petit abri à l'extérieur car les animaux sont interdits dans les refuges. Nous nous prenons en photo et finalement je décolle à 8 h seulement. Le temps est superbe et je peux enfin voir le Grand Lac du Viso sous le refuge.
A l'extrémité du lac, je file à droite en direction du Passo delle Sagnette tandis que le groupe de français prendra à gauche un sentier plus tranquille par le Passo Gallarino. Le sentier est bien tracé au début et je m'élève tranquillement dans des alpages puis des pierriers assez difficiles où il disparaît puis réapparaît un peu plus loin. Et j'arrive au passage chaîné. Un panneau avertit les randonneurs : casque, baudrier et longe obligatoire. Il s'agit en fait d'une via ferrata mais sans le câble habituel qui court d'un bout à l'autre (appelé la ligne de vie) et sur lequel on mousquetonne la longe fixée au baudrier. Evidemment je n'ai pas l'équipement ad hoc mais je n'ai pas trop le choix. Les alpinistes qui montent au Mont Viso sont passés depuis longtemps et je suis seul dans la paroi, il y a donc peu de risques de chutes de pierres. Je plie mes bâtons et les accroche sur le sac à dos et j'y vais tranquillement. C'est en fait assez facile. Des chaînes jalonnent tout l'itinéraire sur les 170 m de dénivelée qui restent à grimper jusqu'au col. Je retrouve les sensations agréables de la via ferrata, surtout que celle-ci n'est jamais physique si on exploite au mieux les gestes habituels de l'escalade. Vires accrochées au dessus du vide, petits dièdres et cheminées se succèdent jusqu'au col. Il fait beau, pas trop chaud et cette petite escalade est un vrai bonheur malgré le poids du sac.
J'arrive au Passo delle Sagnette 35 minutes après le début de la via ferrata et j'y retrouve trois randonneurs bien équipés qui étaient au refuge hier soir. Ils ont pris les casques, les baudriers et une corde uniquement pour monter ici et profiter du paysage. Ils ont dû être un peu surpris de me voir arriver avec simplement mon sac à dos, mais comme ils ne parlent pas français, l'échange est vite limité. J'en profite pour faire une bonne pause au soleil et admirer le paysage. Au nord, éclairé par le soleil, le Monte Viso qui ne semble pas bien difficile à condition de connaître le cheminement vers le sommet (mais il paraît que c'est balisé pratiquement tout le temps) et au sud ouest les trois lacs de Forciolline dans un décor de haute montagne à couper le souffle. On aperçoit même le bivouac Boarelli, tout de gris vêtu avec sa porte jaune qui brille au soleil. Un sentier raide mais peu difficile permet de descendre dans un cirque minéral où un timide balisage et des cairns facilitent la progression parmi les nombreux blocs.
Un hélicoptère tourne depuis une heure maintenant au dessus du Monte Viso. Tournage, photos ou recherche d'alpinistes en détresse, je ne sais pas et je n'en entendrai pas parler ultérieurement. Et puis une inscription sur un gros rocher attire mon attention : Caverna Michel Croz 20 m. La caverne est en fait un abri naturel pouvant contenir plusieurs personnes sous un gros bloc. Quelle surprise, je ne m'attendais pas à trouver ici le nom de ce célèbre guide français disparu lors de la descente de la première ascension du Cervin. Est-ce qu'il est venu traîner ses guêtres sur le Monte Viso ? Une recherche sur internet s'impose et la réponse arrive :
"Michel Croz a réalisé la première ascension de la voie normale du Monte Viso par la face sud le 30 août 1861 avec William Mathews, Frederick William Jacomb et Jean-Baptiste Croz. Il a également réalisé la seconde ascension le 4 Juillet 1862 avec un italien Bartolomeo Peyrot, Francis Fox Tuckett et Peter Perren de Zermatt. La troisième ascension a été réalisée en 1863 par Quintino Sella et des guides italiens, ce même Quintino Sella qui a donné son nom au refuge et qui a fondé le Club Alpin Italien.
Mais nul doute que les habitants des vallées avaient tenté ces ascensions auparavant. Des études menées en 2014/2015 à l'occasion du 150ème anniversaire de l'ascension de la Barre des Ecrins ont montré que l'ascension des grands sommets des Alpes a été réalisée au 18ème ! La carte de la frontière des Alpes dauphinoises a été établie entre 1749 et 1755 sous la direction de Pierre-Joseph de Bourcet et montre déjà ces sommets : ils n'étaient pas inconnus ! Les recherches menées par des français et des italiens montrent que Bourcet et ses officiers ont effectué l'ascension du Monte Viso plus de 100 ans avant la date officielle, durant l’été 1750 ou 1751, portant au sommet un « jalon », comme en atteste la carte de France établie suite à la campagne à travers les Alpes menée entre 1749 et 1755. Ces signaux permettaient les visées de loin, et étaient composés d’un tronc d’arbre de 10 à 15 mètres de hauteur, et d’un drap blanc formant « bannière »"
.
Je poursuis ma descente vers le lac principal. Le sentier longe sa rive sud et des chaînes permettent de franchir quelques passages en surplomb au dessus du lac avant d'arriver au bivouac Boarelli. Il est simple, superbe et pas bien grand, mais l'espace est bien occupé à l'intérieur. Il est très lumineux et semble confortable. J'imagine qu'il y a parfois pas mal de monde à s'y presser, car il est mieux situé que le refuge Quintino Sella pour l'ascension du Viso, mais il faut monter son ravitaillement ! D'ailleurs je rencontrerai plusieurs français qui viennent bivouaquer ici avant de monter au Viso. Je fais une pause prolongée pour me reposer, prendre quelques photos et manger une barre de céréales avant de poursuivre ma route.
C'est ici que je dois prendre le sentier Ezio Nicoli classé EE (per Escursionisti Esperti) pour rejoindre le vallon de Valante. D'après le gardien du refuge, il est plus facile que celui que je comptais prendre initialement. En fait, pendant plus de 700 m de dénivelée, des marques de peinture tracent un vague chemin dans un chaos indescriptible de blocs de toutes les tailles, une cascade minérale raide et délicate enserrée dans une gorge profonde. Les bâtons ne servent pas à grand chose et on risque de les casser s'ils se coincent dans les nombreuses anfractuosités. Du coup les articulations et les muscles des cuisses travaillent à plein régime. Je descends très prudemment avec beaucoup d'attention. C'est interminable, mais je ne veux pas m'arrêter tant que je ne suis pas arrivé en bas. Je pense que j'ai mis plus de temps pour descendre cette cascade pas très agréable qu'il ne m'en aurait fallu pour y monter.
Enfin je trouve vers 12 h 50 un endroit propice pour mon pique-nique à l'ombre d'un gros rocher. Ce n'est pas terrible mais je commençais à avoir faim. Je déballe ce qu'on m'a donné (pour 10 € quand même) au refuge et je trouve 3 tranches de pain (plutôt sec), une minuscule tranche de fromage, une barquette en plastique avec du riz, une olive et un demi champignon (sans blague), une compote. C'est tout ! J'espère me rattraper ce soir au refuge de Valante. Je repars rapidement et un quart d'heure plus tard, j'arrive dans le vallon. Il me reste 400 m de dénivelée à remonter en plein soleil que j'avale en mode diesel en un peu moins d'une heure et demie. Rencontre avec un beau troupeau de charolaises avec leurs veaux.
J'arrive au refuge à 15 h, il fait beau et j'ai donc tout mon temps pour m'installer, me doucher et faire ma lessive. Hier il faisait trop froid pour respecter mon rituel et ça m'a manqué. L'accueil est très sympathique car il y a peu de monde en ce début d'après midi. Je prend une douche chaude très appréciée (4 €, 20 litres) et lave tout mon linge rapidement. Il y a un grand étendage à l'extérieur, du soleil et du vent, ça devrait sécher très vite. Et puis je ne résiste pas à une petite pâtisserie avec mon coca-cola habituel. Le refuge se remplit peu à peu. Le groupe de randonneurs français rencontrés la veille arrive à leur tour. Aux discussions, je sens qu'il est temps que leur randonnée s'achève. Il y a manifestement de l'eau dans le gaz, car une des femmes a pris la direction des opérations de manière un peu autoritaire et ça ne plaît pas à tout le monde ! Enfin, c'est leur affaire.
Le repas a lieu à 19 h. Le refuge est plein et les occupants sont répartis par groupes dans la salle à manger. Comme je suis seul, je me retrouve à une petite table, tout près des cuisines, ce qui me permet d'être servi le premier avec beaucoup d'attentions de la part de la serveuse. Ça ne me gêne pas d'être tout seul, car il y a tellement de bruit dans la salle que je n'entends pas grand chose. Par contre, je bénéficie d'une superbe vue de la face ouest du Monte Viso éclairée par le soleil couchant et j'imagine des tas de voies d'escalade dans la paroi. Le repas est copieux et j'en profite car le pique-nique était plutôt frugal. Finalement, je vais me coucher comme d'habitude vers 21 h 30. Demain est un autre jour, mais ce sera sans aucun doute l'étape la plus dure de ma grande randonnée. Je vais donc essayer de partir le plus tôt possible après le petit-déjeuner.

Hébergement : Refuge de Valante,   , 0039 0175 956 025, accueil très sympathique.         

Repas : Pâtes avec des tomates cuisinées et du parmesan, rôti de porc, macédoine de légumes et polenta, flan à la vanille. Excellent repas.
Tarifs 2016 : DP 47 € en dortoir payables en espèces. Réservation par téléphone. Pas d'arrhes. Pique-nique 10 €, douche 4 €, coca-cola 3 €, pâtisserie 1,50 €.
Commodités : Douche chaude payante, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, étendage extérieur pratique, dortoir classique mais lits récents, pas de coffre pour ranger ses affaires, couettes, toilettes à la turque sans "poignée de relevage".
Téléphone : Free/Orange ne passe pas. En fait, le patron des Baladins à Saint-Véran m'a dit qu'il fallait rechercher le réseau italien de façon manuelle et ne pas rester en configuration automatique. Et ça devrait passer...

Ravitaillement : PN à 10 € : pain, saucisson, salami, fromage, salade mixte au thon (avec des tas de choses), compote poire myrtilles, petits gâteaux. Très copieux, compte tenu des pique-niques fournis par les refuges précédents. J'en garderai même une partie pour le surlendemain.


22 août 2016

Refuge de Valante - Refuge de la Blanche

Longueur étape : 24 km

Heure départ : 7 h 30

Heure d'arrivée : 18 h 00

Durée effective de marche : 9 h 00

Dénivelée cumulée : 3840 m

Déniv. positive : 1950 m

Déniv. négative : 1890 m

Alt min : 1880 m

Alt max : 3052 m

Itinéraire (813 Ko) - Profil (70 Ko)

7 h 30 – Refuge de Valante, 2450 m
8 h 50 - Passo della Losetta, 2872 m
9 h 15 - Pointe Joanne (pause 15 minutes), 3052 m
9 h 55 - Passo della Losetta, 2872 m
11 h 10 - Grange Bernard, 2155 m
11 h 40 - Grange del Rio (Route du Col Agnel), 2012 m
12 h 15 - Caserne Carlo Emanuele III (pique-nique 45 minutes), 2150 m
13 h 30 - Départ du sentier vers le Col de Longet, 1880 m
15 h 20 - Lago Bleu, 2500 m
15 h 45 - Col de Longet, 2665 m
17 h 10 - Col de la Noire, 2955 m
18 h 00 - Refuge de la Blanche, 2500 m

Météo : toute la journée.

Le film de l'étape : Je me lève à 6 h 45, petit-déjeuner à 7 h et départ rapide à 7 h 30. Une jeune randonneuse me demande où je vais et propose de faire une partie du chemin ensemble jusqu'à Chianale car elle va au refuge Agnel. Mais comme elle n'est pas prête et que je n'ai pas l'intention de traîner en route, je décline poliment l'invitation. Il fait frisquet et j'ai mis ma micropolaire pour démarrer. Le sentier monte tranquillement dans des alpages et je découvre sur ce versant des édelweiss. En général à cette époque de l'année, ils commencent à passer un peu, mais ceux-ci sont vraiment de toute beauté. Je poursuis mon chemin et j'arrive au soleil à 8 h 20. Je fais une pause et ôte ma micropolaire. J'aperçois au loin près du col un ancien baraquement militaire où doit se trouver l'embranchement vers la Pointe Joanne. Je vois même le sommet qui ressemble à un dôme débonnaire sans aucune difficulté. Comme il fait vraiment beau, j'ai l'intention de faire le détour, même si je sais que cette étape sera sans aucun doute la plus longue et la plus dure de ma grande randonnée. J'arrive au col, le Passo della Losetta, un peu avant 10 h et j'attaque directement le sentier qui mène à la Pointe Joanne.
Montée tranquille sous un soleil agréable. A mi-chemin du sommet, je rencontre des bouquetins qui se prélassent au soleil. Je passe à quelques mètres d'eux sans les déranger le moins du monde, je prends quelques photos et je les retrouverai en redescendant. Un peu plus haut, je rencontre un jeune bouquetin qui détale sans demander son reste, mais je réussis quand même à le prendre en photo. J'ai cru pendant un bon moment qu'il s'agissait d'un chamois, car les bouquetins ne sont pas aussi craintifs. Mais l'examen attentif des photos montrent à l'évidence qu'il s'agit bien d'un jeune bouquetin : cornes en V moins fines que celles d'un chamois, pelage de la tête uniforme alors que le chamois possède sur la tête une démarcation brune et blanche significative, deux bandes brunes partant du haut de la tête vers le museau avec du blanc entre les deux. J'arrive au sommet à 3052 m où je rencontre deux jeunes français du genre "bohême" en train de déjeuner (dreadlocks et cigarettes roulées qu'on ne trouve pas dans un bureau de tabac, me semble-t-il). On sympathise rapidement et en quelques minutes j'apprends qu'ils ont bivouaqué près du refuge Gagliardone, qu'ils comptaient faire l'ascension du Mont Viso, mais que l'un d'entre eux avait oublié son casque et qu'ils randonnent dans la région, mais ne savent pas trop où aller car ils ont pas de carte ! Bref, l'improvisation comme unique préparation et tout le contraire de mon organisation bien réglée. J'admire le panorama. A l'est le Monte Viso et le Visolotto sont encore dans l'ombre. Au nord, on voit facilement au loin le Mont Blanc et le Pelvoux et un peu plus près dans le vallon qui mène à l'Echalp le refuge du Viso où je me trouvais encore il y a trois jours. A l'ouest on distingue nettement la Tête des Toillies derrière laquelle se trouve le refuge de la Blanche (mon objectif de la journée) et Rocca Bianca où j'irai traîner mes guêtres demain... si tout va bien. Même si le détour m'a coûté une bonne heure, ça en valait vraiment la peine.
Je repars rapidement, reviens au col et commence la longue descente qui va me conduire près de Chianale. Cinq minutes plus tard, je rencontre la randonneuse qui voulait faire un bout de sentier avec moi. On discute quelques minutes et je la laisse rapidement car elle ne descend pas bien vite et je ne suis pas près d'arriver. Le sentier est facile et traverse de grands alpages où paissent quelques troupeaux. Je rencontre deux gardes forestiers italiens à qui je demande quelques renseignements sur la suite de mon itinéraire. Ils me confirment que la construction qu'on voit au loin est bien la vieille caserne Charles Emmanuel où nous avons pique-niqué avec Marythé en 2008 lors d'une randonnée depuis le col Agnel. Je dois passer près de cette caserne et trouver ensuite un sentier qui rejoint celui du col de Longet. J'arrive à la route du col Agnel à 11 h 40 et je prends la route sur près d'un kilomètre pour rejoindre le sentier qui mène à la caserne. Au loin, le Pain de Sucre me fait un petit signe d'encouragement. 
J'arrive à la caserne à 12 h 15. Il fait vraiment chaud et je décide de m'arrêter pour pique-niquer et me reposer un peu. Pause prolongée de 45 minutes où j'en profite pour aérer mes pieds en mangeant l'excellent pique-nique préparé par le refuge de Valante, si on le compare aux piques-niques fournis par les refuges précédents. Je repars à 13 h et cherche sans succès un sentier qui me permettrait de rejoindre le col de Longet. J'aperçois bien en contrebas le sentier qui mène au col, mais il n'est guère envisageable  de couper au hasard dans les prairies, sans que je sache s'il sera possible de traverser les nombreux ruisseaux qui descendent dans le vallon. Je demande leur avis à un couple d'italiens qui prennent le soleil en contrebas. Ils me confirment qu'il faut bien redescendre plus bas (270 m en dénivelée quand même) pour franchir le torrent sur la passerelle où débute le sentier. Je n'ai pas le choix et je me dis que si les gardes forestiers rencontrés plus tôt avaient parlé français, ils m'auraient sûrement conseillé de descendre directement sur Chianale sans passer par la caserne. J'aurais "économisé" au bas mot 300 m de dénivelée (150 à la montée et autant à la descente). Bon, ce qui est fait est fait et je m'engage rapidement dans la descente.
J'arrive à la passerelle vers 13 h 30 où un panneau indique "Col de Longet 2 h - Attention chutes de pierres, parcours déconseillé". Le sentier semble bien fréquenté si on en juge par le nombre de voitures garées sur le parking voisin. D'ailleurs je rencontrerai beaucoup de touristes et même des familles qui viennent du Lago Bleu et qui ont dû braver l'interdiction. Encore une fois, je n'ai pas trop le choix et je vais faire attention. J'attaque la longue montée vers le lac, longue car il fait bien chaud et je m'arrête souvent pour m'hydrater. J'arrive enfin au Lago Bleu à 15 h 20, prend quelques photos et continue en direction du col de Longet. Heureusement, il n'est pas bien loin et j'y arrive 25 minutes plus tard. J'ai mis un quart d'heure de plus que l'horaire indiqué sur le panneau, mais
j'ai bien ralenti le rythme. Je tiens à monter à ma main et en garder sous le pied car je ne suis pas encore arrivé.
Au col de Longet, je fais une bonne pause, je rencontre un couple de randonneurs avec qui j'échange quelques mots et je repars en direction du col de la Noire. Balade tranquille et reposante sur un grand plateau où se trouvent de nombreux lacs que je prends en photo avant de laisser le sentier qui redescend vers Maljasset pour bifurquer vers le nord en direction du col de la Noire. Lorsque la pente s'accentue, des rapaces passent à plusieurs reprises dans le ciel et pendant un moment je pense qu'il s'agit d'aigles royaux. Mais lorsque j'étais au refuge du Viso, j'ai lu que les aigles royaux vivent en couple et que leur territoire de chasse est d'au moins 100 km2. Ils tolèrent rarement d'autres couples dans leur domaine vital. Comme il y a plus d'une dizaine de rapaces, ce sont probablement des vautours. Certains vont se poser au loin sur un pic voisin et lorsque je regarderai les photos le soir au refuge, je distinguerai nettement leur cou décharné. Ce sont bien des vautours et je rencontre près du lac de la Noire une carcasse de mouton fraîchement nettoyée (il reste encore quelques rares lambeaux de viande) qui confirme l'identification.
Tout le versant sud du col de la Noire et la petite Tête Noire sur ma droite est faite de serpentinite. Il s'agit d'une roche jaunâtre à verdâtre (voire vert sombre) ou présentant des inclusions verdâtres qui tire son nom de son aspect semblable à celui d'écailles et provoque une sensation particulière au toucher, qui ont pu faire évoquer la peau du serpent. On en trouve beaucoup dans le Queyras en particulier en montant à la Pointe des Marcelettes au dessus de Saint-Véran. Avant d'arriver au lac, je suis dépassé par 4 jeunes randonneurs qui s'entraînent à la course en montagne. Je les rejoins au col de la Noire à 17 h 10. Le panneau indique qu'il reste encore 1 h 10 pour arriver au refuge de la Blanche. Je fais une bonne pause et demande aux randonneurs de prévenir le gardien du refuge pour qu'il ne s'inquiète pas. Pas de souci, j'arrive !
Je descend prudemment dans une partie schisteuse assez glissante avant d'arriver dans des alpages beaucoup plus faciles où je continue tranquillement dans un silence étonnant avec sur ma droite la Tête de Toillies éclairée par le soleil couchant. C'est un instant magique comme on en rencontre de temps en temps dans une randonnée sur plusieurs jours. J'arrive finalement au refuge à 18 h. Le gardien était prévenu et, de toute façon, il avait tellement à faire avec les nombreux clients encore sur sa terrasse qu'il ne devait pas trop se soucier de moi. On m'attribue une couchette que je peux encore choisir car il n'y a pas grand monde encore dans le dortoir. Je prends ma douche rapidement et fais ma lessive car le repas est à 19 h. Un étendage extérieur, le soleil et un petit vent efficace sont les bienvenus. Mais je serai quand même obligé de tendre ma corde à linge dans le dortoir pour terminer de sécher mes affaires.
Je partage mon repas à une grande tablée avec d'autres randonneurs et quelques enfants. Je me dis qu'il y aura probablement du "rab" et je vais bien en profiter ! Echange d'impressions et de parcours de randonnées avec les convives et en particulier avec 2 jeunes filles qui sont intéressées par mon périple. Elles sont de la région grenobloise (enfin autant que je me souvienne) et je leur donne même l'adresse de mon site internet pour y trouver éventuellement des idées. Je discute aussi un moment avec le gardien du refuge à qui je montre mes photos de rapaces. Au début, il pense aussi à un aigle royal, mais quand je lui dis qu'il y en avait une dizaine et que j'ai trouvé un peu plus haut une carcasse de mouton, il me confirme que ce sont bien des vautours. Je lui dis également que je vais monter demain à Rocca Bianca et que je laisserai mon gros sac au refuge et que je le récupérerai en descendant par les lacs Blanchet. Il me conseille d'être prudent, mais j'ai bien lu le topo sur internet et ça ne devrait pas poser de problème.
Je vais me coucher vers 22 h. Je suis fatigué, mais sans plus et j'aurais pu continuer encore s'il l'avait fallu. La journée a été longue (24 km au moins) et la dénivelée mal estimée (3840 m cumulée). Mais l'imprécision, voire même l'absence de courbes de niveau, sur la partie italienne des cartes IGN n'a pas facilité les choses. C'est bien la première fois que j'arrive dans un refuge à 18 h, mais la journée s'est globalement bien passée et je suis content. Demain, c'est repos ou presque. Une petite randonnée sur les crêtes et ensuite descente sur Saint-Véran où j'aurai du temps pour faire une grande lessive !

Hébergement : Refuge de la Blanche    , 09 88 77 47 53, Francois Giroud, accueil sympathique malgré mon arrivée à une heure tardive et encore beaucoup de monde sur la terrasse.

Repas : Potage, sauté de veau, coquillettes, fromage, tarte aux myrtilles. Repas copieux et bon.
Tarifs 2016 : DP 45 € en dortoir payables par chèque ou en espèces. Réservation par internet. Arrhes 15 €. TS 0,50 €
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, étendage extérieur, dortoir classique mais lits récents, petites étagères pour ranger ses affaires, couettes.
Téléphone : Free/Orange ne passe pas.

Ravitaillement : J'ai encore un peu de ravitaillement pour demain et je vais en profiter pour manger une boîte de pâté Hénaff, puisque je vais pouvoir jeter ma poubelle à Saint-Véran. Je la trimballe en effet depuis le Refuge du Viso...


23 août 2016

Refuge de la Blanche - Saint Véran

Longueur étape : 14 km

Heure départ : 8 h 20

Heure d'arrivée : 14 h 20

Durée effective de marche : 5 h 10

Dénivelée cumulée : 1860 m

Déniv. positive : 690 m

Déniv. négative : 1170 m

Alt min : 1953 m

Alt max : 3059 m

Itinéraire (812 Ko) - Profil (62 Ko)

8 h 20 – Refuge de la Blanche, 2500 m
9 h 10 - Col de Saint Véran, 2844 m
10 h 00 - Rocca Bianca, 3059 m
10 h 20 - Traversée vers les lacs Blanchet, 2980 m
11 h 00 - Lac Blanchet Inférieur, 2770 m
11 h 20 - Refuge de la Blanche, 2500 m
12 h 00 - Chapelle de Clausis, 2370 m
12 h 30 - Pique-nique (30 minutes) à l'ombre près l'Aigue Blanche, 2223 m
13 h 50 - Pont Vieux, 1953 m
14 h 20 - Saint-Véran, 2020 m

Météo : toute la journée.

Le film de l'étape : Lever vers 7 h 30 et départ vers 8 h 20 pour cette journée de "repos". Montée tranquille au soleil vers le col de Saint Véran. Je sors ma boussole et coupe directement dans les alpages à partir de 2650 m et j'arrive au col à 9 h 10. Au sud, le premier objectif, la Rocca Bianca, a fière allure.
Je relis le topo trouvé sur Internet : "Continuer direction sud, la sente qui se dirige vers le bastion de la Rocca Bianca qui a des allures de forteresse imprenable. Un cheminement intelligent va permettre de surmonter les 2 ressauts de la montagne".  Bon, je vais essayer d'être aussi intelligent que le cheminement. En fait, il y a des marques de balisage rouge et blanc un peu partout, donc c'est à la portée de n'importe qui, sauf des malvoyants sans doute... J'attaque le sentier qui mène au premier ressaut. Devant moi, deux randonneurs ont pris un peu d'avance et je me dis qu'il n'y a qu'à les suivre. Mais ils se contentent de passer au pied de la montagne et se dirigent directement vers les lacs Blanchet, non sans avoir jeté un coup d'œil curieux vers la paroi. Tant pis, je suis assez grand pour me débrouiller tout seul.
"Au pied du premier ressaut, se diriger vers des dalles (cairns, vieilles marques de peinture) et les escalader. Continuer par un couloir, d’autres dalles, puis un système de vires jusqu’à l’antécime, petit plateau surmonté d’une croix et qui offre déjà des vues gazeuses". Et bien, c'est une assez bonne description de l'itinéraire. Il faut bien analyser chaque passage, regarder où on va mettre les mains et les pieds, et y aller tranquillement. Les réflexes et les mouvements acquis en escalade ne sont pas de trop. Si le vide est assez présent, il n'est jamais angoissant, même s'il n'y a pas de chaînes pour sécuriser les passages. Un gros bloc coincé me freine un peu et je ne suis pas assez grand pour l'attaquer de face. Alors je le contourne prudemment du côté du vide où il y a de bonnes prises. Heureusement que je n'ai pas pris mon gros sac, car je ne suis pas sûr que je serais passé. Finalement j'arrive sans encombre au sommet du premier ressaut à l'extrémité duquel se trouve une croix en métal. De là, la vue plonge sur la vallée de Chianale et le Lago di Castello. Au loin, le Mont Blanc, le Monte Viso, la Tour des Toillies, les Ecrins, la vallée d'Aigue Blanche et la Chapelle de Clausis. Je repars en direction du second ressaut.
"Par un ensemble de dalles, de rochers et de vires, se rendre au pied du deuxième ressaut. Suivre un amusant couloir qui se termine par des blocs coincés que l’on surmonte facilement. Des dalles faciles, permettent d’atteindre l’étroite plate-forme sommitale". Les difficultés sont moindres que dans la première partie et je trouve facilement le petit couloir aux blocs coincés que j'escalade assez facilement pour arriver au sommet principal, lui aussi surmonté d'une croix. La vue est splendide et je prends tout mon temps pour l'admirer.
J'imaginais redescendre par l'autre côté, mais il y a une arête très effilée en lame de couteau sans vires ni prises évidentes et je ne sais pas très bien où elle mène. Je découvre au sommet deux spits (un système d'ancrage fixé dans le rocher) permettant aux alpinistes de s'assurer ou de descendre en rappel. J'en déduis assez rapidement qu'il ne faut pas tenter le diable, que je suis déjà bien content d'être parvenu au sommet et je vais donc redescendre par où je suis monté. Je désescalade le second ressaut et aperçoit des cairns sur ma gauche. Je décide de tenter l'aventure. Si ça ne passe pas, je rebrousserai chemin. Je descends dans des pierriers assez faciles, des gros blocs un peu moins, des vires assez larges et des petits couloirs sans danger jusqu'au lacs Blanchet.
Soudain, un bruissement d'ailes. Je viens de surprendre des lagopèdes dans leur livrée de fin d'été. On l’appelle aussi la perdrix des neiges. Cet oiseau d’une trentaine de centimètres ressemble à un petit faisan et change de plumage suivant la saison. En hiver il se revêt d’un plumage blanc immaculé qui devient gris-brun en été de façon à se fondre dans le paysage et à échapper à ses prédateurs. Il est difficile à observer, car son plumage lui permet de passer inaperçu même si on passe à quelques mètres de lui. C'est la seconde fois que j'en aperçois. La première fois, c'était en 2008 avec Marythé à quelques centaines de mètres d'ici, entre le Pic de Caramantran et le col de Saint Véran. Encore une bonne surprise car peu de gens ont la chance d'en apercevoir.
Je continue ma descente vers le lac Blanchet Supérieur, puis le lac Blanchet Inférieur où des linaigrettes dessinent des arabesques. J'arrive au refuge de la Blanche à 11 h 20 où je fais une petite pause avant de récupérer mon gros sac. Je choisis de rejoindre la Chapelle de Clausis par un sentier peu fréquenté qui serpente tranquillement dans les alpages alors que pratiquement tous les randonneurs et les vététistes empruntent le chemin carrossable situé un peu plus haut. Il fait très chaud maintenant et je fais une pause à l'ombre de la chapelle malheureusement fermée. Je m'arrêterai un peu plus loin lorsque le GR viendra longer le torrent de l'Aigue Blanche. A un moment donné, il me faudra remonter vers Saint-Véran et je demande son avis à un randonneur qui vient de la vallée. Il
connaît bien le coin et me conseille de continuer jusqu'à Pont Vieux le long de la rivière pour bénéficier un peu plus longtemps de l'ombre des arbres.
Vers 12 h 30, je trouve une petite plateforme herbeuse à l'ombre au bord du torrent où je m'installe pour pique-niquer et je liquide une boîte de pâté Hénaff que je porte avec moi depuis le départ. Je repars sur le sentier qui se transforme rapidement en un chemin empierré qui longe l'Aigue Blanche. Il fait 35 °C, les rochers surchauffés renvoient la chaleur et il me tarde d'arriver. A Pont Vieux, le chemin remonte dans les alpages vers Saint-Véran. Il n'y a pas un seul arbre pour donner un peu d'ombre, mais le but est proche. J'arrive à l'entrée du village, trouve une poubelle pour me débarrasser de mon sac de déchets que je traîne depuis 4 jours et pars au dessus du village où doit se trouver d'après mes souvenirs le gîte Les Baladins.
Il est 14 h 20 lorsque je pousse la porte d'entrée. Le gardien me reçoit de façon très cordiale et m'indique mon dortoir. Je suis seul pour l'instant et je choisis ma couchette. Il y a des coffres sous les lits pour mettre ses affaires et c'est très pratique. A côté de la chambre, il y a la douche, le lavabo et les toilettes. Je prends une bonne douche et fais ma lessive à l'eau chaude dans le lavabo. Comme j'ai le temps, j'en profite pour laver mon short. Il n'est pas vraiment sale, car j'ai fait très attention en m'asseyant, sac plastique sous les fesses, serviette de table lors des pique-niques, mais après 10 jours, il vaut mieux en profiter. Un petit étendage est accroché à la barre d'appui de la fenêtre et je peux y mettre mon linge en plein soleil. Il va sécher très rapidement, même le short.
Après un coca-cola à l'ombre de la salle à manger, car il fait vraiment chaud, même sous la tonnelle, j'envoie quelques coups de téléphone et des SMS pour donner de mes nouvelles. En effet, ça fait 5 jours que je suis en montagne où le téléphone ne passe pas. Je vais ensuite à l'Office du Tourisme pour demander s'il y a des restrictions d'accès aux sentiers après les éboulements à la Pointe de la Saume. Et bien non, les chutes de pierres ont lieu dans un vallon où il n'y a pas de sentier, donc pas de problème. Cela me rassure car je vais passer tout près de ce sommet après-demain en allant au refuge de Basse-Rua. Je descends faire quelques emplettes à la supérette en bas du village : yaourts aux fruits pour me rafraîchir et quelques gâteaux secs pour compléter le pique-nique de demain. Je me balade ensuite dans le village où je fais quelques photos. Lorsque je reviens au gîte, 4 randonneurs britanniques se sont installés dans le dortoir, mais la cohabitation ne pose aucun problème.
Un très bon repas nous est servi à 19 h 15. Je suis à une table avec deux couples de randonneurs. L'un d'eux ne sait pas trop où aller demain et il semble très intéressé par mon itinéraire. En effet, je vais partir en pèlerinage en retournant sur les crêtes au dessus de Saint-Véran où nous sommes allés avec Marythé en 2008. Je leur explique en détail par où il faut passer en les assurant que, même si la montée est rude, il n'y a pas de danger et que la vue est splendide sur la vallée de Saint-Véran au nord et sur celle de Ceillac au sud. Comme je vais partir plus tôt qu'eux, je ne pense pas les voir, sinon de loin... Je vais me coucher vers 21 h 30 et passe une bonne nuit.

Hébergement : Gîte Les Gabelous, , 04 92 45 81 39, Pierre Belle, accueil très sympathique.

Repas : Cake, potage, gigot d'agneau, purée, fromage, gâteau au chocolat avec un coulis de framboise. Repas de bonne qualité.
Tarifs 2016 : DP 39 € en dortoir payables par chèque, espèces ou CB. Réservation par téléphone. Arrhes 10 €. TS 0,50 €, coca-cola 2,50 €.
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, petit étendage accroché à la barre d'appui de la fenêtre, dortoir classique un peu vieillot mais lits confortables, casiers à roulettes pour ranger ses affaires, couettes.
Téléphone : Free/Orange passe sans difficultés.

Ravitaillement : J'ai acheté un peu de ravitaillement à l'épicerie en bas du village et je vais en profiter pour manger ma dernière boîte de pâté Hénaff, puisque je vais pouvoir jeter ma poubelle à Ceillac.


24 août 2016

Saint Véran - Ceillac

Longueur étape : 18 km

Heure départ : 8 h 00

Heure d'arrivée : 15 h 15

Durée effective de marche : 6 h 15

Dénivelée cumulée : 2900 m

Déniv. positive : 1250 m

Déniv. négative : 1650 m

Alt min : 1849 m

Alt max : 2909 m

Itinéraire (734 Ko) - Profil (63 Ko)

8 h 00 - Saint-Véran, 2020 m
8 h 20 - Pont du Moulin, 1849 m
9 h 30 - Croix de Curlet, 2301 m
10 h 25 - Pic Cascavelier, 2576 m
11 h 20 - Arrivée sur les crêtes (pause 10 minutes), 2896 m
11 h 30 – Pointe des Marcelettes, 2909 m
12 h 25 - Pique-nique (25 minutes), 2740 m
13 h 00 - Tête de Jacquette, 2757 m
13 h 15 - Col des Estronques, 2651 m
14 h 15 - Le Touret, 1960 m
15 h 15 - Ceillac, 1640 m

Météo : toute la journée.

Le film de l'étape : Lever à 7 h 15 et petit-déjeuner à 7 h 30 tapantes : pain frais, beurre, marmelade de rhubarbe (du jardin), jus d'orange, yaourt. Le rêve, c'est la première fois que je déjeune aussi bien. Je pars à 8 h dans un village abandonné par les touristes et je descend rapidement au Pont du Moulin. Je connais bien le parcours pour l'avoir déjà fait en 2008 avec Marythé. Au pont, je rencontre une famille qui randonne avec des ânes et qui a posé ses deux tentes au bord du torrent. Ça ne me paraît pas très judicieux, car il y fait un froid de canard. Les gamins en petite tenue semblent frigorifiés.
Montée agréable à l'ombre dans l
e Bois du Moulin, passage aux Cabanes de Lamaron et arrivée sous un soleil très agréable à la Croix de Curlet. Je fais une bonne pause, ôte ma micropolaire et admire le paysage : Saint-Véran, la vallée de Clausis, Molines-en-Queyras et la Pointe des Marcelettes (où je vais passer tout à l'heure). En contrebas, une famille arrive avec des enfants et je pense qu'ils vont rapidement me rattraper. Je continue par les crêtes vers le Pic Cascavelier. Il se découvre peu à peu et j'hésite un moment. Est-ce que je vais passer directement par l'arête nord ouest ou le contourner par le sentier classique ? Avec Marythé, on avait escaladé directement l'arête, mais avec mon gros sac... Finalement, il fait beau, je suis en forme et je ne vais pas me dégonfler maintenant. J'attaque directement l'arête que je trouve moins difficile que prévu. D'ailleurs les deux gamins me collent aux basques et vont bientôt me rattraper. J'arrive au sommet quelques minutes avant eux. Ce sont de vrais petits chamois suivis de près par leur mère. Et en plus, l'un d'eux, d'une dizaine d'années, connaît tous les sommets qu'on aperçoit au loin : Pic de Caramantran, Monte Viso, Rocca Bianca, Tête des Toillies. Leur père et une autre personne arrivent un peu plus tard, car ils ont hésité longtemps avant de s'engager sur l'arête.
Après une bonne pause, je repars sur la longue crête qui monte à la Pointe des Marcelettes. Je rencontre de la serpentinite et je me rappelle qu'en 2008 j'en avais emporté dans mon sac un gros bloc de plus de 6 Kg. J'aperçois deux randonneuses un peu plus haut, mais j'y vais tranquillement car la montée est assez longue. Ça ne sert à rien de se précipiter, j'ai tout mon temps et une fois sur la crête, c'est un long cheminement sans dénivelée significative qui m'attend jusqu'au col des Estronques où je n'aurai plus qu'à descendre vers Ceillac. J'arrive sur la crête à 11 h 20. J'en profite pour faire une longue pause et je ne résiste pas au plaisir de monter à la Pointe des Marcelettes dans du schiste bien délité. Mais il y a de bonnes prises, il faut juste faire attention de ne pas glisser. Au sommet, j'aperçois en contrebas le couple de randonneurs rencontrés hier soir. Ils vont suivre mon parcours jusqu'au col des Estronques, puis redescendre ensuite sur le Pont du Moulin où ils ont dû laisser leur voiture. Je leur lance des appels et me manifeste en faisant de grands signes avec mes bâtons. Ils m'ont aperçu eux aussi et on se salue à distance. Ils leur faudra bien encore une heure avant d'arriver sur la crête. Le paysage est magnifique : Les Ecrins, les Pics de la Font Sancte, la Pointe de la Saume (où on voit nettement l'éboulement récent), Saint-Véran...
Je repars et rencontre sur la pointe voisine les deux randonneuses qui me précédaient. Je continue sur la crête, mais la fringale me pousse à m'arrêter pour pique-niquer. Je cherche un endroit à l'ombre, mais il n'y a rien. Je continue et finalement je vais m'arrêter dans un repli de terrain à l'abri du vent qui n'est pas bien chaud. Je me construis un petit siège et m'installe confortablement. J'ôte même mes chaussures pour laisser mes pieds respirer et je mange la seconde boîte de pâté Hénaff que je transporte depuis le départ avec quelques biscuits secs du refuge de Valante. Je repars et me rends compte que je me suis arrêté à cinq minutes à peine de la Tête de Jacquette. Si j'avais su, j'aurais certainement poussé jusque là. Je redescend au col des Estronques et j'attaque la longue mais assez roulante descente vers Ceillac. Il y avait pas mal de vent sur les crêtes, mais au fur et à mesure que je descends, je ressens une chaleur torride. Il fait 35 °C à mon altimètre et je m'hydrate souvent. Finalement tout se passe bien et je mettrai même 2 h pour descendre au lieu des 2 h 40 affichés au col.
Au passage j'en profite pour visiter la petite chapelle restaurée de Saint Urs à Rabinoux. Il s'agirait en fait de Saint Ours. Internet explique que "Saint Ours est un saint patron éponyme de nombreux lieux se rattachant à plusieurs saints, mais la majorité se situe autour du massif alpin. Saint Ours d'Aoste serait un prêtre irlandais du VIème siècle principalement invoqué aux naissances d'enfants morts sans avoir eu le sacrement du baptême et aussi pour les rhumatismes. Avant d’être évêque vénéré, Saint-Ours aurait évangélisé longtemps dans le département des Alpes-de-Haute-Provence. Il semble cependant que l'origine irlandaise soit une légende".
A Ceillac, le village est calme, écrasé sous le soleil. J'arrive aux Baladins et la patronne me loge dans un petit dortoir au sous-sol où se trouve déjà un autre randonneur, un réunionnais de 80 ans qui fait de petites étapes. Chapeau ! J'espère pouvoir en faire autant lorsque j'aurai son âge. En une petite heure, j'expédie ma douche et ma lessive à l'eau chaude. Il fait très chaud et mon linge va sécher rapidement sur le grand étendage extérieur. Je me souviens que nous étions déjà passé ici avec Jacques en 2008 et que j'avais lavé mon short, tellement il faisait beau et chaud. Puis je vais à l'office du Tourisme me renseigner à nouveau sur l'éboulement de la Pointe de la Saume. Rien de nouveau, je peux emprunter l'itinéraire du Pas du Curé qui passe dans le vallon voisin. Ensuite, je vais faire mes courses au Proxy du village. Je vais acheter 2 pique-niques et, s'ils me conviennent, j'en achèterai 2 autres lorsque je repasserai ici dans deux jours. Je prends la même chose pour les deux repas : une salade italienne au thon, pommes de terre, tomates, haricots verts, oignons, poivrons rouges, olives noires... (de la marque Grand Jury, une sous marque de Carrefour), du riz au lait et une pomme golden. J'achète un coca-cola bien frais et des yaourts pour compléter mon pique-nique de ce midi.
Je rentre au gîte car il n'y a qu'à l'intérieur qu'il fait bon, surtout au sous-sol finalement. Dehors il y a un peu d'air, mais beaucoup de chaleur. Du coup, le linge sèche rapidement. Il y a un couple de randonneurs qui est arrivé et qui cherche à rafistoler des "nu-pieds" de randonnée avec de la colle à chaussures. Ils font le GR 5, mais ils ont l'air un peu à côté de leurs pompes, c'est le cas de le dire. Vers 18 h 30, un vététiste arrive dans le dortoir. Il n'est pas très causant, mais on en apprendra un peu plus lors du repas où on se retrouvera à la même table avec le réunionnais. Il veut partir le plus tôt possible demain car il veut monter au col des Estronques, redescendre sur Saint-Véran, remonter au col de Chamoussière, redescendre sur le col Agnel, remonter au col Vieux avant de descendre sur l'Echalp dans la vallée de Ristolas, et tout cela avec son VTT. Un truc de dingue ! Mais je pense qu'il va y arriver. Un excellent repas nous est servi à 19 h 15. On a l'impression d'être au restaurant. Il y a du cabillaud sur une fondue de poireaux. Inutile de dire qu'on n'aurait pas cela dans un refuge classique ! Je me couche vers 21 h 20 avant une petite virée demain dans le val d'Escreins.

Hébergement : Gîte Les Baladins, , 04 92 45 00 23, accueil sympathique, mais c'est un peu l'usine...

Repas : Potage, dos de cabillaud à la fondue de poireaux, macédoine de légumes, fromage, tarte aux fruits. Excellent repas.
Tarifs 2016 : DP 39,50 € en dortoir + TS 0,50 € payables par chèque, espèces ou CB. Réservation par internet, arrhes 10 €/jour (en fait 20 € en tout puisque j'ai aussi réservé pour le 26 août, mais la patronne m'a déduit mes 20 € d'arrhes seulement lors de mon second passage...).
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, grand étendage extérieur très pratique, dortoir classique un peu vieillot, casiers à roulettes pour ranger ses affaires, couvertures.
Téléphone : Free/Orange passe très bien.

Ravitaillement : J'ai acheté deux pique-niques (salade italienne au thon "Le Grand Jury", riz au lait, pomme) à l'épicerie du village pour les deux jours qui viennent.


25 août 2016

Ceillac – Refuge de Basse Rua

Longueur étape : 16 km

Heure départ : 7 h 35

Heure d'arrivée : 15 h 05

Durée effective de marche : 6 h 30

Dénivelée cumulée : 2510 m

Déniv. positive : 1310 m

Déniv. négative : 1200 m

Alt min : 1640 m

Alt max : 2900 m

Itinéraire 842 Ko) - Profil (58 Ko)

7 h 35 - Ceillac, 1640 m
8 h 15 - Pied du Mélezet, 1685 m
9 h 35 - Ruisseau de la Pisse (embranchement vers le Pas du Curé), 2130 m
11 h 40 - Pas du Curé, 2783 m
12 h 00 - Col de la Colette Verte (pique-nique 40 minutes), 2900 m
14 h 25 - Arrivée au Rif Bel, 1900 m
15 h 05 - Refuge de Basse Rua, 1750 m

Météo : toute la journée.

Le film de l'étape : Lever à 6 h 40 avec un excellent petit déjeuner à 7 h 00 : pain frais, beurre, confiture, jus d'orange et yaourt. Je pars à 7 h 35 en longeant le torrent du Cristillan. Le sentier monte un peu (et il fait un peu plus chaud), puis redescend au niveau du torrent (et il fait plus froid) avant d'arriver au Pied du Mélezet. C'est un des trois parkings au fond de la vallée d'où partent les promeneurs pour monter au Lac Miroir, au Lac Saint Anne ou au Col Girardin. C'est aussi ici que passe le GR 5 que nous avons emprunté avec Jacques lors de notre traversée des Alpes en 2008. Je connais donc le sentier pour l'avoir déjà parcouru en sens inverse.
La montée est régulière, en lacets assez raides dans la forêt, pour atteindre une passerelle en bois en encorbellement avec un beau panorama sur le Pied du Mélezet et le vallon de Chaurionde. Le sentier reprend ensuite, toujours assez raide, mais il est à l'ombre. Il faut prendre son temps en profitant du panorama, du chant des oiseaux et de la brise matinale ! Le chemin continue ensuite dans la forêt jusqu'à rejoindre un vallon où coule le ruisseau de la Pisse. On entend l'eau qui bouillonne pendant une bonne partie de la montée, mais on ne voit jamais la célèbre "Cascade de la Pisse". Je me dis qu'elle se trouve en contrebas, cachée dans les arbres, mais personne au refuge de Basse Rua n'a pu me dire comment l'apercevoir. Et bien, j'ai raté une belle occasion de la découvrir car je suis passé à quelques dizaines de mètres ce matin. En effet Internet m'a indiqué le bon chemin après mon retour : "Au panneau "Pied du Mélezet", avant de tourner à droite pour suivre le GR 5, continuer tout droit sur une cinquantaine de mètres pour aller observer de près la cascade de la Pisse". Cela fait deux fois que je passe tout près de cette cascade sans la voir !
Une passerelle permet de franchir le ruisseau de la Pisse avec un beau panneau indicateur. En examinant la carte, je suis sûr que je dois quitter le GR 5 avant de franchir le ruisseau pour le remonter en rive gauche vers le Pas du Curé et le col de la Colette Verte. Il y a bien un vague sentier un peu effacé qui part sur la droite, mais aucune des directions portées sur le panneau indiquent où il mène. Après réflexion, comme je suis à peu près sûr de mon analyse, je prends ce petit sentier très sympathique à peine tracé dans l'herbe qui remonte le ruisseau vers le sud. Cinq minutes après, je rencontre un randonneur qui me confirme que je suis bien sur la bonne route. Le sentier débouche dans des alpages tranquilles avec un petit lac, puis part sur la droite dans un vallon plus tourmenté où le minéral devient de plus en plus présent. 
En face de moi, je vois bien à présent la Pointe de la Saume avec son côté nord-est nettoyé par les avalanches récentes. Sur sa gauche, un col très raide avec sans doute le passage du Pas du Curé. La montée est difficile en plein soleil, même s'il y a parfois un peu d'air frais. Je m'arrête assez souvent pour m'hydrater et chercher les marques de peinture jaune qui balisent le chemin. Celui-ci disparaît parfois dans un dédale de blocs et, lorsque j'arrive près d'une balise, je cherche toujours la suivante. Mon expérience sur le GR 20 n'est pas inutile. Je me suis égaré en 2006 dans les Aiguilles de Bavella en ratant une ou deux balises, j'ai continué en pensant retrouver le sentier un peu plus loin et j'en garde un très mauvais souvenir. Depuis lors, je sais qu'il vaut mieux revenir sur ses pas que de persévérer dans une mauvaise direction. Puis le sentier se redresse, dans du schiste vraiment glissant, avec des passages parfois assez exposés. J'arrive enfin au Pas du Curé à 11 h 40.
Un panneau explique l'origine du nom donné à ce passage. Il a été emprunté par l'abbé Edouard David, originaire de Vars et curé de Ceillac, qui a accompagné en 1935 des chasseurs alpins pour relier les deux vallées. Je bois un bon coup et je décide de continuer jusqu'au col de la Colette Verte tout proche que j'aperçois au sud car il n'y a qu'une centaine de mètres de dénivelée. J'y arrive à 12 h 00 et je n'ai plus qu'à redescendre dans le val d'Escreins pour rejoindre le refuge. Je ne vois pas un poil d'ombre dans la descente et je décide de pique-niquer au col. Il y a heureusement un peu d'air, je m'installe confortablement et je me déchausse tranquillement. Je me régale avec ma salade au thon, mon riz au lait et ma pomme golden. C'est décidé, demain j'achète la même chose à Ceillac pour les deux jours suivants. Je repars à 12 h 40 pour une longue descente de 1300 m de dénivelée.
Sous le col, le sentier est agréable et bien tracé dans un pierrier. Je rencontre un peu plus bas un couple de jeunes randonneurs britanniques qui montent vers le col. Ils sont bien chargés (avec la tente, les matelas et tout le barda...) et je les encourage sincèrement. Je traverse ensuite une zone de grès rouge qui met de la couleur au milieu des alpages encore bien verts. Je trouve quelques beaux édelweiss près d'un petit lac complètement asséché vers 2500 m d'altitude. Et puis le sentier devient de plus en plus raide dans des pierriers glissants, avant de plonger dans une faille qui va me conduire tout en bas dans le val d'Escreins. La dernière partie n'est pas des plus agréables. Et pourtant, la fin du parcours est entièrement câblée et d'habitude j'aime bien ces sortes de via ferrata. Mais ici, le sentier est extrêmement glissant, les petits cailloux partent de tous côtés et les câbles ont été scellés pour faciliter la montée des randonneurs. Ils sont placés un peu trop bas pour ceux qui descendent et mes bâtons me gênent. Je ne les ai pas rangés dans mon sac, pensant que le passage serait de courte durée. En fait je vais suivre cette espèce de via ferrata pendant encore une demi-heure avant d'atteindre avec soulagement le torrent du Rif Bel.
Il est 14 h 25 et je vais longer le torrent pendant 2,5 km avant d'atteindre le refuge. Le sentier est agréable, mais la chaleur est étouffante, même quand je trouve un peu d'ombre en passant près des pins à crochets qui poussent près du torrent. Près du refuge, des œuvres d'art sont exposées en pleine nature et suscitent la curiosité. Je rencontre une main géante "qui nous invite à méditer sur notre destin qui, par nos actes, est entre nos mains". Près de la vieille chapelle de l'ancien hameau de basse Rua, des assemblages de lattes en bois sont censés représenter les monstres des montagnes qui hantaient jadis le val d'Escreins. Et puis le long de la piste qui mène au refuge, je rencontre d'étranges lampadaires réalisés avec des bouteilles de lait en plastique. Gaëlle, la gardienne du refuge, m'explique que ces lampadaires s'allument à la nuit tombée lorsqu'on passe près d'eux. En effet, je remarque, en revenant un peu plus tard, un capteur de proximité et des petites ampoules à l'intérieur. Ces lampadaires sont appelés les pissenlits, car ils ressemblent à la fameuse boule plumeuse sur laquelle on ne peut s'empêcher de souffler lorsqu'on les rencontre lors de ballades en campagne. Piqué par la curiosité, j'irai y faire un tour vers 21 h 30 pour "allumer" ces réverbères qui auraient beaucoup plu au petit prince.
J'arrive au refuge un peu après 15 h où je reçois un accueil très sympathique. La gardienne, Gaëlle, m'indique mon dortoir où il n'y a personne pour l'instant. Je m'installe et prend ma douche, puis je fais ma lessive que je fais sécher sur un étendage parapluie en plein soleil. J'en profite aussi pour laver mon mouchoir et une paire de socquettes que je mets parfois le soir dans mes tennis. Puis je déguste une grosse tarte aux myrtilles et framboises avec un coca-cola en rédigeant mes impressions journalières.
Entre temps, deux randonneurs expérimentés, entre la trentaine et la quarantaine, sont arrivés. Ils sont partis ce matin du Pied du Mélezet un peu avant moi, sont passés par le Pas du Curé, mais sont redescendus ensuite dans le vallon des Pelouses avant de remonter au Pic d'Escreins et de redescendre sur le refuge. Ils ont donc parcouru une partie de mon itinéraire de demain et j'en profite pour leur demander des informations sur le trajet. Et puis de fil en aiguille, on en vient à parler de randonnées et on se rend compte qu'on a pas mal de choses en commun. Ils connaissent très bien tous les refuges et les sommets entre le col du Petit Saint Bernard et Val d'Isère en particulier du côté italien que j'ai parcouru l'année dernière.
Je demande également à Gaëlle des renseignements sur mon itinéraire et lorsqu'elle apprend que je vais monter au refuge de Furfande dans 2 jours, elle me dit de donner le bonjour à ses parents. Je n'avais pas fait le rapprochement, mais elle porte effectivement le même patronyme (Zalio) que les gardiens du refuge de Furfande. Je parcours les différents ouvrages qui trônent sur les tables à la disposition des randonneurs et je constate alors que plusieurs d'entre eux ont été réalisés par Michel Zalio, un guide de haute montagne. Les photos sont superbes et les textes empreints de poésie. Elle me confirme qu'il s'agit bien de son père. Alors tout d'un coup, je me souviens des nombreux articles de journaux que j'ai parcouru au refuge de Furfande lors de mon premier passage et qui raconte l'histoire de ce refuge. Je n'avais pas eu le temps de discuter un peu avec les gardiens ce soir là, car j'étais arrivé assez fatigué en fin d'après-midi et je devais être occupé par mon rituel journalier (douche, lessive...). De plus ils avaient fort à faire pour préparer les repas et s'occuper de tout le monde car le refuge était complet. Mais je raconterai leur belle histoire un peu plus tard.
Après un excellent repas, je sors me balader un peu pour allumer les "pissenlits". C'est vraiment magique et l'idée est très originale ! Et puis, je vais me coucher tranquillement vers 22 h pour une bonne nuit réparatrice. Il ne me reste que 4 étapes...

Hébergement : Refuge de Basse Rua, , 06 22 66 58 21, Gaëlle Zalio, accueil très sympathique.
Repas : Potage de légumes, lasagnes farcies, salade, fromage, gâteau au chocolat avec une boule de glace. Excellent repas.
Tarifs 2016 : DP 43 € en dortoir + TS 0,40 € payables par chèque ou espèces. Réservation par téléphone, pas d'arrhes. Coca-cola 3 €, pâtisserie 6 €.
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, étendage parapluie extérieur, dortoir classique, couettes.
Téléphone : Free/Orange passe assez bien à condition de trouver le bon endroit à l'extérieur.

Ravitaillement : J'ai encore un pique-nique (salade italienne au thon "Le Grand Jury", riz au lait, pomme) acheté à Ceillac.


26 août 2016

Refuge de Basse Rua – Ceillac

Longueur étape : 17 km

Heure départ : 7 h 55

Heure d'arrivée : 15 h 45

Durée effective de marche : 6 h 20

Dénivelée cumulée : 2650 m

Déniv. positive : 1270 m

Déniv. négative : 1380 m

Alt min : 1640 m

Alt max : 2734 m

Itinéraire (545 Ko) - Profil (62 Ko)

7 h 55 – Refuge de Basse Rua, 1750 m
9 h 50 - Embranchement vers la crête d'Agnès, 2260 m
11 h 00 - Pic d'Escreins (pause 20 minutes), 2734 m
12 h 30 - Falaise d'escalade du Vallon des Pelouses (pique-nique 45 minutes), 2182 m
14 h 20 - Belvédère de la Mourière, 2330 m
15 h 45 - Ceillac, 1640 m

Météo : toute la journée.

Le film de l'étape : Petit déjeuner à 7 h 30 et départ à 7 h 55. Je reviens sur mes pas pour éteindre les "pissenlits" (non, ils s'éteignent tout seuls) et rejoindre l'embranchement en direction du Pic d'Escreins. Le sentier démarre de façon très progressive dans un sous bois agréable. Cinq minutes après le départ, je trouve un embranchement qui permet de rejoindre directement le refuge de Basse Rua et qui m'aurait évité un petit détour. La gardienne ne m'en avait pas parlé, mais ça n'a pas d'importance. Un peu plus haut, des câbles et des échelons sécurisent des portions pas vraiment difficiles ni exposées, mais ça donne un petit coup de pouce.
Vers 2100 m d'altitude, le sentier suit les nombreux contours de la montagne, traverse des pierriers, remonte des pentes herbeuses et coupe quelques torrents à sec sans gagner beaucoup d'altitude. Il y a tellement de bombements, de renflements et de circonvolutions que le temps me paraît un peu long et que je me demande si je n'ai pas raté l'embranchement vers la Crête d'Agnès. Puis vers 9 h 50, l'intersection tant attendue apparaît avec un panneau "Pic d'Escreins 0 h 30". Au dessus, quelqu'un a ajouté au feutre 1 h 30, ce qui me semble beaucoup plus raisonnable car il reste encore 470 mètres de dénivelée. Petite pause avant de poursuivre par un sentier qui fait de grands virages en montant progressivement sur une belle croupe  herbeuse sans un arbre en plein soleil. Par moment, on aperçoit en contrebas le refuge de Basse Rua.
J'arrive au Pic d'Escreins à 11 h et je m'octroie une bonne pause de 20 minutes pour manger une barre de céréales et admirer le paysage. On voit le Pas du Curé et le vallon des Pelouses, le Mont Blanc, les glaciers de la Vanoise, l'Ailefroide, le Pic du Coup de Sabre, le Pic sans Nom, la Pointe Puiseux du Pelvoux et le Glacier Blanc, le col et le refuge de Furfande où j'irai demain pour terminer ma grand boucle. Les noms des sommets sont donnés sous réserve de validation par un de mes plus fidèles lecteurs, Pierre de Puy-Aillaud, qui connaît bien la région. Et puis je trouve aussi au sommet de jolis bouquets d'édelweiss. Il est maintenant temps de repartir. La descente est agréable
et facile jusque vers 2400 m d'altitude où j'arrive à la Crête d'Andreveysson. Le sol est à présent constitué essentiellement d'une poussière blanchâtre et pulvérulente comme de la craie qui s'effrite sous les pas. Le sentier se fraye un passage dans une gorge raide et je me dis que ça va être un peu sportif. Mais il y a plus de place pour passer que je l'imaginais et en descendant calmement j'arrive en bas sans encombre.
Un peu plus loin, je trouve un gros rocher à l'ombre duquel je m'installe pour pique-niquer tranquillement dans un petit vallon vert des plus bucoliques. De là, je peux admirer à quelques dizaines de mètres les évolutions de deux cordées (une française et une italienne) sur un site d'escalade d'un calcaire bleu et jaune près de la Bergerie d'Andrevez. Il s'agit de la falaise du Vallon des Pelouses (ou de la Saume) d’une centaine de mètres de hauteur en léger dévers parcourue par une quinzaine de voies du 6c+ au 8b+. Je sais, c'est technique mais les connaisseurs apprécieront ! Un peu plus tard, six grimpeurs apparaissent sur le sentier qui monte de l'Ubac de l'Aval et se joignent aux deux français. Ils se connaissent tous et sont certainement des grimpeurs de haut niveau. Mais il me faut bien repartir.
Je passe devant la Bergerie d'Andrevez où je dérange quelques marmottes et continue en direction du Belvédère de la Mourière. Le sentier remonte sur 200 m de dénivelée, emprunte quelques vires et traverse une zone de lapiaz avant de se transformer en un sentier balcon bien agréable. Je grimpe sur le belvédère pour prendre quelques photos de la vallée de Ceillac. Après une petite pause, je continue sur un sentier agréable dans de petites pentes et un sous bois qui me procure une peu de fraîcheur. Des trouées me permettent de faire encore quelques photos, en particulier de l'Eglise Sainte Cécile de Ceillac où je vais démarrer ma randonnée demain dès l'aube. Et j'arrive aux baladins à 15 h 45.
Cette fois-ci, pas de dortoir en sous sol, j'ai droit à une petite chambre avec deux autres randonneurs. L'un d'eux a 77 ans et fait de petites étapes comme le réunionnais que j'avais rencontré ici il y a deux jours. L'autre vient de Briançon et va jusqu'à Menton par le GR 5. Et comme d'habitude, douche, lessive et courses au proxy pour acheter mes 2 pique-niques avec un coca-cola bien frais. Comme il fait trop chaud dans la chambre, je vais squatter le sous sol pour passer mes appels téléphoniques et SMS avant de rédiger mes impressions journalières. Je m'inquiète un peu pour mon retour vers Rennes, car je n'ai pas pris mon billet de train. Laurence me rassure, le guichet de la gare de Mont-Dauphin est bien ouvert le lundi. Avant le repas, je vais faire quelques photos de la Chapelle Saint Antoine de Padoue près du gîte et je vais reconnaître un petit chemin à travers champs pour gagner directement l'Eglise Sainte Cécile où je trouverai demain matin le départ du sentier vers Bramousse.
Excellent repas comme la dernière fois et discussions avec mes commensaux sur les itinéraires de la région. L'étape de demain va me permettre de boucler la boucle en repassant au refuge de Furfande où j'ai commencé mon grand tour du Queyras. Elle va être plus difficile et plus longue que les étapes des jours précédents et j'ai donc négocié avec la patronne pour pouvoir déjeuner un peu plus tôt. Elle accepte que je descende à 6 h 30 et c'est parfait. Je vais me coucher tranquillement vers 21 h.

Hébergement : Gîte Les Baladins, , 04 92 45 00 23, accueil sympathique, mais c'est un peu plus calme ce soir...

Repas : Potage, rosbif, poêlée campagnarde, fromage, crème brûlée. Excellent repas.
Tarifs 2016 : DP 39,50 € en dortoir + TS 0,50 € payables par chèque, espèces ou CB. Réservation par internet, arrhes 10 €/jour (en fait 20 € en tout puisque j'ai aussi réservé pour le 26 août, mais la patronne m'a déduit mes 20 € d'arrhes seulement lors de mon second passage...).
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau chaude) où on peut faire la lessive, grand étendage extérieur très pratique, dortoir classique un peu vieillot, casiers à roulettes pour ranger ses affaires, couvertures.
Téléphone : Free/Orange passe très bien.

Ravitaillement : Pour les deux jours qui viennent, j'ai acheté à l'épicerie du village deux pique-niques identiques à ceux d'avant-hier puisque je les ai bien appréciés (salade italienne au thon "Le Grand Jury", riz au lait, pomme).


27 août 2016

Ceillac – Refuge de Furfande

Longueur étape : 18 km

Heure départ : 7 h 00

Heure d'arrivée : 15 h 00

Durée effective de marche : 6 h 30

Dénivelée cumulée : 2820 m

Déniv. positive : 1740 m

Déniv. négative : 1080 m

Alt min : 1185 m

Alt max : 2293 m

Itinéraire (820 Ko) - Profil (61 Ko)

7 h 00 - Ceillac, 1640 m
8 h 35 - Col de Bramousse, 2251 m
9 h 25 - Chalets de Bramousse, 1850 m
10 h 10 - Bramousse, 1477 m
10 h 35 - Pont de Bramousse, 1185 m
11 h 20 - Route des Escoyères, 1380 m
11 h 55 - Les Escoyères (pique-nique 50 minutes), 1532 m
13 h 05 - Le Châtelard, 1650 m
14 h 20 - Col de la Lauze, 2089 m
15 h 00 - Refuge de Furfande, 2300 m

Météo : toute la journée.

Le film de l'étape : Réveil à 6 h 10, ablutions matinales et comme il ne fait pas bien chaud dehors, j'enfile ma micropolaire et m'allonge sur mon lit avant de descendre prendre mon petit déjeuner. Et là, j'entends un crac inquiétant. J'avais posé mes lunettes sur le lit et j'ai oublié de les remettre. Pas trop de dégâts : un fil de nylon cassé, mais le verre est intact. Je mets les lunettes et je constate que ça ne me gène pas trop pour lire la carte. Je vais donc randonner avec un seuil œil et personne ne va s'en apercevoir. Petit déjeuner à 6 h 30 comme prévu et départ à 7 h à travers champs. Je passe à côté de l'Eglise Sainte Cécile située à l'écart du village, mais qu'on voit sur toutes les cartes postales de la région. Un sentier bien agréable monte régulièrement dans le Bois du Cheynet, puis dans des alpages jusqu'au col de Bramousse. J'ai ôté ma micropolaire depuis un bon moment mais le col est toujours dans l'ombre. Avant de descendre, je prends quelques photos des sommets derrière moi avant de les quitter pour un bon moment : les Pics de la Font Sancte, la Pointe de la Saume, la Dent de Rocher et le Pic d'Escreins.
La descente est aussi agréable que la montée dans quelques sous bois et des alpages où je retrouve le soleil. J'arrive aux Chalets de Bramousse après un peu de hors piste à cause d'une balise GR pas très bien placée. J'ai constaté ensuite sur la carte qu'il y a effectivement un vieux sentier qui contourne les habitations, mais il ne semble plus utilisé. Un vieux chalet soutenu par des étais menace de s'effondrer en face d'une petite chapelle fermée. Le sentier longe un chemin empierré en l'empruntant sur la fin avant d'arriver au hameau de Bramousse. Une fontaine généreuse et un banc au soleil m'incitent à une petite pause près de l'église et j'en profite pour manger ma barre de céréales. C'est dans ce hameau que se trouve le gîte du Riou Vert où ont fait étape les deux randonneurs seniors (le réunionnais de 80 ans et celui de 77 ans que j'ai rencontré hier). Et puis je repars pour descendre vers le Pont de Bramousse par un sentier raide mais finalement assez facile.
J'arrive à 10 h 35 au pont qui franchit le Guil, la rivière qui descend d'Abriès et qui va se jeter dans la Durance à Mont-Dauphin. Il y a du spectacle car c'est manifestement le point de départ des descentes des gorges du Guil en raft. Plusieurs équipages attendent leur tour. Comme la rivière est très encaissée, chaque guide pousse son raft depuis la petite route et lui fait exécuter un saut d'une dizaine de mètres avant de toucher l'eau. En bas, dans une petite crique, un autre raft récupère celui qui vient d'arriver pendant que les occupants empruntent un petit sentier pour gagner la rivière. Des couleurs, de l'animation et de la fraîcheur. Je resterais bien là un moment pour profiter du spectacle, mais le plus dur m'attend : 1100 m de dénivelée jusqu'au refuge de Furfande dont une bonne partie en plein soleil, il faut repartir.
L'itinéraire me semblait un peu compliqué sur la carte, mais il suffit en fait de traverser la route de Château Queyras pour trouver le départ d'un sentier récent puisqu'un panneau avertit les randonneurs que des ouvriers peuvent encore travailler à son aménagement. Il est tracé dans une pinède, mi ombre mi soleil, et ses nombreux lacets permettent de gagner rapidement de l'altitude. Le sentier rejoint la route des Escoyères qu'il suit sur quelques dizaines de mètres avant de repartir sur la gauche dans un sous bois puis des pentes herbeuses grillées par le soleil qui mènent au hameau des Esponces. Il retrouve ensuite la route et passe devant une grande chapelle avec un beau cadran solaire signé G.Z.F. et réalisé en 1857. Giovanni Francesco Zarbula est un peintre cadranier piémontais qui a réalisé de nombreux cadrans solaires dans le Briançonnais de 1833 à 1870.
Cent mètres plus loin, la route arrive au hameau des Escoyères où se trouve un gîte, mais surtout une fontaine rafraîchissante, deux tables de pique-nique avec des bancs à l'ombre. Il est pratiquement midi et je n'hésite pas une seconde car je commence à avoir faim.
Ça fait maintenant 5 heures que je suis parti et il ne me reste que 750 m de dénivelée pour atteindre le refuge. J'ai bien avancé. Je laisse mes pieds respirer et je prends mon temps car il fait toujours très chaud et il n'y a pas beaucoup d'air. Je déguste mon pique-nique et finalement il faut bien repartir. Je fais un petit détour pour voir une autre chapelle restaurée, mais fermée, consacrée à Saint Romuald. Je passe près du Châtelard et continue dans un sous bois avant de déboucher dans une zone beaucoup plus tourmentée. Il n'y a plus d'arbres, pas de vent, uniquement des pierriers et des rochers qui renvoient la chaleur qu'ils ont accumulée toute la journée. Ça devient quand même un peu plus difficile et je fais de nombreuses pauses pour m'hydrater.
Au détour du sentier, j'ai la surprise de retrouver le couple de randonneurs rencontrés à Saint-Véran à qui j'avais conseillé de faire les crêtes de la Pointe des Marcelettes jusqu'à la Tête de Jacquette. Je les avais aperçu pendant leur montée, mais il me fallait continuer sans les attendre. Ils me disent qu'ils ont été très contents de cette sortie et qu'ils ont apprécié le parcours en crête que je leur avais suggéré. Ils redescendent sur Arvieux et ont déjeuné au refuge de Furfande. On se quitte, très contents de cette rencontre inattendue. J'arrive au col de la Lauze à 14 h 20. Ce n'est pas un vrai col, mais plutôt une petite selle au pied de la Crête de Croseras. D'ailleurs, le sentier continue à monter dans des alpages où la vue est maintenant bien dégagée. J'aperçois au loin le refuge de Furfande où j'arrive à 15 h. Finalement je redoutais un peu cette étape, mais tout s'est bien passé.
Je salue le gardien, Michel Zalio, et je lui donne le bonjour de sa fille Gaëlle, la gardienne du refuge de Basse Rua où j'étais encore hier matin. J'en profite aussi pour parler un peu de cette famille étonnante. J'avais lu quelques articles de journaux dans le refuge lors de mon premier passage le 14 août dernier, mais j'étais arrivé assez tard, le refuge était plein et je n'avais pas eu le temps de discuter avec le gardien ni avec son épouse Laure qui était très occupée à la cuisine. J'en ai appris un peu plus le 25 août avec Gaëlle leur fille qui garde le refuge de Basse Rua, en particulier sur son père Michel, guide de haute montagne, grand voyageur, écrivain et poète à ses heures. Son site internet présente ses voyages, ses livres, ses conférences et sa page Portrait donne un bel aperçu de
son style et de son écriture.
J'ai particulièrement aimé les textes qui accompagnent les photos d'un de ses premiers livres, "Le Queyras, Pluriel & Singulier" publié en 2004 aux éditions Equinoxe et malheureusement épuisé. Dans la préface, il raconte qu'il a bourlingué partout, dans des pays inaccessibles, des montagnes gelées, des parois en dévers pour s'apercevoir finalement qu'il pouvait trouver ici dans le Queyras ce qu'il cherchait parfois bien loin ailleurs. Et arrivé à un âge qui lui permet de jeter un regard lucide sur la vie intense qu'il a mené jusqu'alors, il termine par ces paroles pleines de sagesse : "Mais las ! A force de revenir à pied, en stop, un bras en écharpe ou le pantalon troué, sous les sourires narquois de mes proches, j'ai compris que se lever matin, aux aurores, poser sans peur une semelle sur un aimable sentier, admirer les multitudes d'êtres vivants faire la fête au soleil, à l'ombre d'un pin Cembro, pouvaient apporter au moins autant de sérénité et de satisfactions que des activités proches de la barbarie".
Les superbes photos de son livre (celui publié en 2004) sont accompagnées de petits textes qui ne parlent pas du Queyras contrairement à ce qu'on trouve habituellement dans ce genre d'ouvrage. Les auteurs présentent en général leur région, son histoire, la vie dans les villages, la faune et la flore alors que Michel Zalio donne la parole aux choses. Il fait parler le sentier qui deviendra le GR, agréable pour les vrais randonneurs et amoureux de la nature, mais plus sournois et pavé d'embûches avec les grincheux. Il raconte l'épopée d'un petit caillou qui fait un long voyage en passant de la semelle d'un randonneur à la chaussette d'un prélat pour revenir à son point de départ, Maranuit, le lieu-dit où se trouve le refuge de Furfande. Il fait aussi parler l'orage, les fleurs... dans son style plein de poésie. Je découvre aussi dans le refuge un autre bouquin de Michel Zalio, Bivouac Africain, publié en 2000. La critique de la revue Vertical résume bien ce que j'ai ressenti à la lecture de ce superbe ouvrage : "Un livre merveilleux pour tous les amateurs de désert. Ne ratez pas les textes : de vrais perles... ".
Je m'installe dans une chambre où se trouve déjà un autre retraité randonneur, un peu plus jeune que moi, qui est parti depuis 40 jours depuis le Périgord et va terminer son voyage après demain à Briançon en passant par le col des Ayes. Il fait de petites étapes, par exemple demain il va à Brunissard seulement, et envoie des commentaires et quelques photos sur son blog dès qu'il a une connexion internet satisfaisante. Aujourd'hui, il a de la chance, car en allant sur le sentier qui vient du col de la Lauze à 800 m du refuge, il peut recevoir la 4G en ligne directe depuis la station de Risoul 1850 au dessus de Guillestre. Il est muni de tous les raffinements technologiques actuels et j'espère qu'il n'a pas trop de problèmes pour recharger les batteries de ses appareils. Ce n'est pas possible dans tous les refuges, surtout si les ressources photovoltaïques sont limitées.
Je prends ma douche, fais ma lessive et m'envoie une bonne tarte aux myrtilles avec un coca-cola en rédigeant mes impressions de la journée. Je donne de mes nouvelles par téléphone avant de passer à la salle à manger où un excellent repas nous attend. Le soir, le ciel est assez dégagé et une animation est organisée par Boris. Il a construit lui-même une lunette astronomique entièrement démontable (à partir du modèle inventé par John Dobson en 1968), un peu comme celle-ci, mais un peu plus rustique et qui tient dans une petite valise. Il l'installe et nous présente les constellations qui nous entourent et en particulier les anneaux de Saturne. C'est toujours étonnant de voir des planètes de ses propres yeux, plutôt qu'à la télévision ou dans des revues. Et puis je vais me coucher tranquillement vers 22 h pendant que mon coturne lit un livre sur sa tablette... Quand on ne peut plus se passer de la technologie !

Hébergement : Refuge de Furfande      , 06 16 56 23 79, Laure et Michel Belin-Zalio.
Repas : Potage, filet mignon de porc sucré salé (sauce avec bananes, ananas...), riz, fromages, poire cuite avec sauce au chocolat et amandes. Excellent.
Tarifs 2016 : DP 48 € en chambre payables par chèque ou espèces. Réservation par téléphone, pas d'arrhes. Coca-cola 3 €, pâtisserie 5,80 €.
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau froide) où on peut faire la lessive (petit étendage extérieur trop limité). Par contre des coffres sur roulettes sous les lits seraient un plus pour le rangement. Couettes appréciées.
Téléphone : Free/Orange passe bien en sortant un peu. La 4G passe même à quelques centaines de mètres quand on est en vue directe de la station de Risoul 1850 au dessus de Guillestre.

Ravitaillement : J'ai commandé un pique-nique à 10 € pour ma randonnée demain vers le Pic du Béal Traversier et je garde l'autre pour mon retour lundi à Mont-Dauphin.


28 août 2016

Pic du Béal Traversier

Longueur étape : 10 km

Heure départ : 7 h 55

Heure d'arrivée : 14 h 45

Durée effective de marche : 5 h 00

Dénivelée cumulée : 1780 m

Déniv. positive : 890 m

Déniv. négative : 890 m

Alt min : 2281 m

Alt max : 2910 m

Itinéraire (365 Ko) - Profil (55 Ko)

7 h 55 – Refuge de Furfande, 2300 m
8 h 20 - Col de Furfande, 2500 m
8 h 40 - Pic du Vacivier, 2631 m
9 h 00 - Pic du Gazon, 2744 m
10 h 05 - Collet après la Crête du Vacivier, 2665 m
10 h 40 - Arrivée sur la crête, 2865 m
11 h 05 - Pic du Béal Traversier, 2910 m
11 h 25 - Pic du Béal Céveilhan, 2895 m
12 h 35 - Collet au bout de l'arête sud ouest, 2635 m
13 h 00 - Pique-nique (30 minutes) à la fin des difficultés, 2530 m
14 h 45 - Refuge de Furfande, 2300 m

Météotoute la journée.

Le film de l'étape : Lever à 7 h 00 et petit déjeuner avec mon voisin de chambre, le randonneur du Périgord. Lorsque j'arrive dans la salle à manger, j'entends dans un silence religieux un concerto pour flûte de Teleman que Laurence jouait lorsqu'elle était au conservatoire. Lorsque Michel vient m'apporter mon petit déjeuner, je lui dis que ça me rappelle l'ambiance du refuge Robert Blanc lorsque John Durdilly, le premier gardien du refuge, mettait de la grande musique et réclamait, voire imposait le silence pour pouvoir écouter la musique en toute quiétude. Il sourit et me dit : "Ça fait bien longtemps ! ". Et oui, John a gardé le refuge jusqu'en 1995 et nous l'avons rencontré en 1993 avec Marythé et Norbert Silvin lorsque nous avons fait le Dôme des Glaciers par l'arête des Lanchettes.
Après le petit déjeuner, je lui montre le topo que j'ai trouvé sur internet pour aller au Pic du Béal Traversier : "Très belle randonnée en boucle, très alpine et sportive malgré le faible dénivelé dû au départ élevé (2500 m) du col de Furfande". Il ne connaît pas ce topo et me recommande de faire très attention, car "c'est un terrain de montagnard et de chasseur !". Il me dit aussi qu'il y aura sûrement des pas d'escalade surtout du côté de la crête du Vacivier. Je le sens un peu dubitatif, mais je le rassure en lui disant que je n'hésiterai pas à faire demi-tour si je ne suis pas sûr de moi. Avant de partir, il me montre aux jumelles une douzaine de mouflons dans des pierriers sous la crête de Croseras.
Je pars à 7 h 55 vers le col de Furfande où je retrouve le soleil. De là je remonte la crête herbeuse et facile du Pic du Vacivier, puis du Pic du Gazon (vers 2740 m) où les marmottes s'amusent au soleil et une vingtaine de vaches paissent tranquillement. Je les retrouverai au retour en passant près des chalets de Furfande (vers 2250 m), c'est-à-dire 500 m plus bas (en dénivelée). Ce sont des vaches sportives qui n'hésitent pas à monter en altitude pour trouver leur nourriture.
Du sommet du Pic du Gazon, je peux voir en détail la suite de l'itinéraire. La montée sur la crête à gauche du Béal Céveilhan ne semble pas poser de problème avec la trace finale bien visible dans les éboulis. Par contre on ne voit pas le Béal Traversier, caché derrière le Béal Céveilhan. Je peux aussi détailler toute la crête orientée sud ouest depuis le Béal Céveilhan jusqu'au collet situé à 2635 m. C'est sans aucun doute la partie la plus délicate de la traversée et je verrai bien lorsque j'y serai. Au pire, je pourrai toujours faire demi-tour si je ne me sens pas très bien. Par contre la descente du collet 2635 dans le vallon de Furfande ne me semble pas trop compliquée, même s'il faudra sans doute faire attention dans les pentes herbeuses où je trouverai peut-être des traces ou des cairns pour me guider.
Je continue vers la crête du Vacivier. Pendant les 20 premières minutes, elle ne pose aucun problème. C'est une crête herbeuse comme les précédentes peut-être un peu plus aérienne. Et puis elle devient rocheuse et nécessite de contourner par la gauche (sud-ouest) un gros gendarme par de petites vires faciles, mais exposées. Heureusement, le chemin est balisé par des marques jaunes qu'il faut bien chercher car elles sont minuscules, sans doute pour ne pas défigurer la montagne. Mes notions d'escale me sont très utiles : respecter la règle des trois points (garder en permanence au moins trois points d'appui lors de la progression, c'est-à-dire les deux pieds et une main ou les deux mains et un pied), prises de main inversées, en opposition... Rassurez-vous, je ne vais pas vous faire un cours ! Le vide est bien présent mais je continue très calmement en assurant tous mes mouvements. Au bout d'un long moment, j'arrive de l'autre côté de la crête du Vacivier et il ne me reste plus qu'à descendre pour rejoindre un collet à 2665 m au pied de la dernière crête.
Une bonne montée dans une pente herbeuse assez raide mais plus ou moins tracée me conduit au pied d'une zone de rochers rouges où je trouve un passage sur la gauche qui nécessite quelques pas d'escalade. Il n'y a pas de problème et ce petit ressaut est franchi facilement. J'arrive ensuite dans la zone d'éboulis constituée de schistes friables et assez glissants, mais la trace que j'ai aperçue depuis le Pic du Gazon me permet de la traverser sans trop de difficultés, même si elle est moins facile que je l'espérais.
Et j'arrive sur la crête à 10 h 40. Je laisse de côté le Béal Céveilhan pour l'instant et continue vers le Béal Traversier. En face ouest, une bonne trace remonte sous la crête vers le nord en direction du sommet. Par moment ça se corse vraiment en particulier sur la fin. Le dernier ressaut me donne quelques soucis. J'essaie de le contourner par la gauche, mais je ne vois pas bien ce qu'il y a derrière et je reviens sur mes pas. Nouvelle tentative par la droite où je descends, peut-être un peu trop bas, avant de pouvoir remonter sur la crête. Ce n'est pas grave, le sommet est maintenant à portée de la main. Il est surmonté d'un triangle métallique géodésique alimenté par des panneaux solaires situés en contrebas. Il y a un dispositif (capteur, émetteur ?) fixé sous le sommet du triangle et coiffé d'un casque d'escalade Petzl. Singulière protection... Il est 11 h 05. Je prends quelques photos sans trop m'attarder car je ne sais pas ce qui m'attend ensuite et je voudrais être sorti des grosses difficultés avant de pique-niquer.
Je reviens sur mes pas en essayant de trouver une autre solution pour contourner le ressaut qui m'avait donné des difficultés à l'aller. Je vois assez nettement une trace sur la droite et je tente ma chance de ce côté là. Je butte ensuite sur un bec rocheux que je contourne par la gauche sur une petite vire assez exposée. Je teste prudemment chaque prise avant de m'y accrocher car certaines ne sont pas bien fiables et sont même carrément friables ! Le rocher est vraiment agressif et j'aurai les mains toutes râpées à la fin de la traversée. J'arrive de l'autre côté sans trop de difficultés, mais c'était quand même un peu chaud. La suite ne présente pas de problèmes, je reviens sur la crête et je monte au sommet du Béal Céveilhan. Je mange une barre de céréales en contemplant les sommets alentour que j'ai du mal à identifier. Je peux voir maintenant la crête que je vais emprunter jusqu'au collet 2635 et ce n'est pas très engageant.
Inutile de perdre trop de temps, j'y vais. Un premier ressaut se présente dès le départ, mais un cairn m'indique clairement que je dois l'escalader par la gauche. Ce n'est pas trop difficile au début, tant qu'il y a des cairns. Mais ça ne dure pas et un autre bastion se présente. Le topo indique que "les passages rocheux sont à contourner par la gauche versant est par des pentes assez raides où il faudra faire attention de ne pas glisser". Je descends prudemment pour le contourner et remonte ensuite sur la crête où j'aperçois un cairn sur un sommet secondaire. Ensuite ça ne passe plus. Je redescends dans des pentes raides et des éboulis instables. S'il y a des chamois qui me regardent, ils doivent bien se marrer ! Je monte, je descends, je cherche le meilleur passage en assurant bien tous mes pas pendant encore une petite heure avant d'apercevoir le collet 2635. La grande pente herbeuse qui y mène est couverte d'édelweiss et je prends le temps de les photographier, car je n'en ai pas vu beaucoup pendant mon périple.
Il est 12 h 35 lorsque j'arrive au collet. Je commence à avoir faim, mais je veux pique-niquer l'esprit tranquille, dégagé de toute cette tension nerveuse due à la concentration pendant la traversée. Il reste peut-être quelques difficultés et je décide de continuer jusqu'à des roches moutonnées que j'aperçois un peu plus bas. Effectivement quelques traces de sentier facilitent la descente, à condition de prendre les bonnes, car il y en a plusieurs au départ. Je m'en sors plutôt bien et je trouve un gros bloc qui va m'apporter un peu d'ombre. Il est 13 h 00, j'empile quelques pierres pour me faire un petit siège, je me déchausse et je sors le pique-nique préparé par le gardien. Il est excellent : tomate, jambon, fromage, beurre, cornichon, chips, pomme et barre de céréales. Sans doute un des meilleurs que j'ai mangé pendant ces derniers jours.
Je repars une demi-heure plus tard en descendant dans les alpages et en observant les troupeaux de bovins qui vont boire dans un petit lac au dessus des Granges de Furfande. Je coupe à flanc de montagne en suivant les traces des troupeaux pour ne pas perdre trop d'altitude et j'arrive finalement au refuge à 14 h 45. Michel est étonné de me voir déjà et même admiratif lorsque je lui confirme que je suis bien allé jusqu'au sommet du Béal Traversier. Je lui dis que j'ai beaucoup apprécié cette randonnée, mais que je n'y emmènerai personne sous ma propre responsabilité. Il y a trop de danger à mon avis pour quelqu'un qui n'est pas habitué à ce type de terrain. On discute tranquillement au soleil, il me demande ce que je veux boire et je prends un coca-cola alors que, contrairement à mes habitudes, je n'ai pas pris encore ma douche ni fait ma lessive... Enfin c'est le dernier jour et une petite entorse à la routine n'est pas un drame.
Je rencontre aussi pour la première fois Laure, l'épouse de Michel, qui prend le soleil avant de remonter au col de Furfande avec son mari pour aller passer quelques jours chez eux. J'en profite pour discuter avec elle, car elle tient un rôle essentiel dans l'histoire de ce refuge. Elle a été gardienne de refuge depuis toujours, un peu partout dans les Alpes, avant de revenir garder le refuge de Furfande pendant 12 ans. Le propriétaire hésitant à investir dans la rénovation du refuge, Laure a cassé sa tirelire et, avec l'aide de toute sa famille, elle a racheté le refuge pour 300.000 € en 2012. Et puis, elle a remué ciel et terre pour trouver les aides nécessaires afin de le détruire et de le reconstruire. Le projet d'environ 500.000 € a été financé à hauteur de 60 % par l'Europe, la région PACA, le département des hautes Alpes et le programme des énergies renouvelables Syme 05. Comme elle le dit, "il n'était pas question de faire un refuge du Goûter bis - Quelle horreur !. J'ai souhaité garder l'authenticité du lieu et me fondre dans le paysage avec les 80 chalets d'alpage de Furfande. Même la fuste datant de 1883 a été réintégrée dans le refuge d'hiver voisin". Je lui dis qu'en l'écoutant, une citation me vient instantanément à l'esprit, celle qu'on a attribué à des alpinistes britanniques du XIXème siècle : "Là où il y a la volonté, il y a un chemin". Je pense qu'elle s'applique très bien à elle qui a su "remuer les montagnes" pour faire revivre ce refuge. Modestement, elle me dit qu'elle n'était pas toute seule et que beaucoup de monde l'a aidée. C'est vrai, mais sans elle, le refuge de Furfande ne serait sans doute pas ce qu'il est.
L'après midi est déjà bien entamé lorsque je prends possession de ma couchette. Je me retrouve dans une chambre plus petite avec un jeune randonneur pas très expérimenté. Je prends ma douche et fais ma lessive, même si ce n'est pas vraiment nécessaire puisque je serai de retour à Mont-Dauphin demain et que j'ai encore de quoi me changer. Laure et Michel, les gardiens, remontent au col de Furfande où se trouve leur 4x4 pour aller passer quelques jours chez eux dans la vallée. Michel part avec une petite remorque qui se déplace sur chenillettes grâce à un moteur du genre tondeuse à gazon. Il peut ainsi remonter les poubelles et redescendre le ravitaillement pour le refuge.  Je passe quelques coups de fil pour rassurer la famille en attendant le repas du soir. Il est excellent comme les fois précédentes, mais les jeunes filles qui remplacent les gardiens me confessent que c'est Laure qui l'a préparé avant de partir. Après le repas, le ciel est couvert et le vent est froid. Boris renonce à nous montrer les étoiles, mais on peut encore apercevoir aux jumelles quelques mouflons descendus assez bas dans le pierrier en face du refuge. Je vais me coucher vers 21 h 30. C'est ma dernière nuit dans le Queyras, je repars demain...

Hébergement : Refuge de Furfande      , 06 16 56 23 79, Laure et Michel Belin-Zalio.
Repas : Potage de légumes, sauté de veau forestière, plateau de fromages, ananas frais. Excellent comme d'habitude, le repas a été préparé par Laure avant son départ.
Tarifs 2016 : DP 48 € en chambre payables par chèque ou espèces. Réservation par téléphone, pas d'arrhes. Coca-cola 3 €.
Commodités : Douche chaude, lavabos (eau froide) où on peut faire la lessive (petit étendage extérieur trop limité). Par contre des coffres sur roulettes sous les lits seraient un plus pour le rangement. Couettes appréciées.
Téléphone : Free/Orange passe bien en sortant un peu. La 4G passe même à quelques centaines de mètres quand on est en vue directe de la station de Risoul 1850 au dessus de Guillestre.

Ravitaillement : Il me reste le pique-nique que j'ai acheté à Ceillac et que j'ai gardé pour mon retour à Mont-Dauphin.


29 août 2016

Refuge de Furfande - Mont Dauphin

Longueur étape : 21 km

Heure départ : 8 h 00

Heure d'arrivée : 14 h 50

Durée effective de marche : 5 h 45

Dénivelée cumulée : 1930 m

Déniv. positive : 270 m

Déniv. négative : 1660 m

Alt min : 890 m

Alt max : 2300 m

Itinéraire (804 Ko) - Profil (67 Ko)

8 h 00 - Refuge de Furfande, 2300 m
9 h 10 - Col Garnier, 2279 m
10 h 55 - Torrent de la Valette, 1500 m
12 h 05 - Gros (pique-nique 45 minutes), 1390 m
13 h 45 - Le Coin, 1205 m
14 h 20 - Eygliers, 1066 m
14 h 50 - Gare de Mont-Dauphin, 890 m

Météotoute la journée.

Le film de l'étape : Lever à 7 h 00 et petit déjeuner tranquille. Inutile de se presser puisque mon train ne part qu'à 21 h ce soir. J'ai prévu de rentrer directement sur Rennes par le train de nuit en passant par Paris, comme à l'aller. Après un dernier regard sur quelques mouflons qui sont toujours au même endroit, je pars tranquillement et multiplie les photos des chalets de Furfande que je ne verrai plus dès que j'aurai dépassé le col Garnier. Montée facile dans un alpage vers le col et descente tout aussi tranquille de l'autre côté. Je guette l'intersection avec le sentier qui mène à la cabane de Valette. Rien, ni trace significative, ni balisage, ni pancarte. Je quitte le sentier et monte à droite dans les alpages là où il devrait se trouver. Toujours rien, je ne suis peut-être pas monté assez haut. Pourtant la trace est bien indiquée sur ma carte IGN. J'ai remarqué à Souliers par exemple en comparant ma carte avec une édition plus récente qu'il y a pas mal de modifications d'une édition à la suivante. J'en déduis assez rapidement que le sentier a disparu et, comme je n'ai pas envie de chercher de midi à 14 h, je continue sur le GR 541 comme me l'a conseillé hier soir un couple de randonneurs de Mont-Dauphin.
J'attends de passer aux ruines du lieu-dit Les Girards pour être certain d'être sur le bon sentier et je préviens Marythé par SMS de mon changement d'itinéraire puisque je capte bien le réseau. Le sentier descend dans une belle forêt, traverse le torrent de la Valette, puis remonte avant de surplomber les gorges du Guil. Mais comme les gorges sont trop encaissées, on ne voit pas grand chose. Dommage. Je continue par une piste empierrée qui descend vers le hameau du Gros. C'est assez reposant pour les muscles et les articulations, mais il fait très chaud et j'ai encore 36 °C au thermomètre de mon altimètre. Un groupe de vététistes me double à toute vitesse. Certains ont une caméra GoPro sur leur casque et je me dis que s'ils prennent une gamelle à cette vitesse, ça va leur faire un beau souvenir. Ils me remercient quand même au passage car j'ai pris la précaution de m'écarter dès que je les ai entendus.
Je m'arrête vers midi à quelques centaines de mètres de Gros sous un arbre qui me procure une ombre très agréable avec un petit vent frais qui diminue sensiblement la température. Je me déchausse et déguste mon pique-nique tranquillement. Je n'ai pas dû choisir le bon endroit car, après un quart d'heure, je surprends de grosses fourmis en train de se balader dans mes affaires. Je les chasse comme je peux, mais je n'ai pas trop envie de bouger car je suis trop bien installé. Je repars un peu plus tard et je fais un détour pour aller visiter la chapelle du hameau avec ses peintures naïves. Je reprends ma descente sur une petite route goudronnée qui serpente au flanc de la montagne et ménage de superbes points de vue sur Guillestre, Risoul 1850, les gorges du Guil et la citadelle de Mont-Dauphin. Construite par Vauban à partir de 1693, elle est destinée à interdire l'accès de la vallée de la Durance aux troupes du Duc de Savoie et elle a été baptisée ainsi en hommage au fils de Louis XIV. Mais 3,5 km sur une petite route en plein soleil avec le goudron qui commence à fondre, ce n'est pas terrible, même si les points de vue sont superbes.
J'arrive à Le Coin où je retrouve le chemin par lequel j'aurais dû arriver si j'avais pris l'itinéraire prévu initiallement. Difficile de dire si cet itinéraire était meilleur que l'autre car, à part la petite route sous le soleil, j'ai finalement bien apprécié celui que j'ai pris. Je continue par un chemin empierré à travers les champs pour rejoindre Eygliers où je visite l'église. Et puis pour aller à la gare de Mont-Dauphin, je n'ai pas le choix : c'est forcément la route !
Un peu avant d'arriver à la gare, un 4x4 s'arrête à ma hauteur. Ce sont des britanniques accompagnés de français qui cherchent un parking "où on peut voir des marmottes" !. J'en ai vu pas mal ce matin, mais c'était à 2200 m d'altitude et il n'y avait pas de parking. Un peu abasourdi, je ne sais pas quoi répondre et ils me tirent d'embarras en me disant qu'ils vont aller se renseigner au village un peu plus haut (il s'agit d'Eygliers). Je leur dis que c'est une bonne idée et je continue.
Je traverse le hameau et retrouve la boulangerie "La Galette de Vauban" où j'ai acheté un pain aux raisins il y a 16 jours. Elle est fermée et n'ouvre qu'à 15 h 30, je reviendrai plus tard. Je passe devant l'hôtel restaurant où j'ai l'intention d'aller dîner ce soir et j'arrive à la gare à 14 h 50. La boucle est bouclée et je suis vraiment satisfait de ce grand tour du Queyras où tout s'est finalement bien passé.

Le retour au pays : Je me repose quelques minutes et j'attends mon tour au guichet. Je demande une couchette pour le train de nuit et là, surprise, il n'y en a pas une de libre, que ce soit en 1ère ou 2nde classe. Comme j'ai aussi noté avant de partir les horaires des trains pour Lyon, je prends immédiatement la décision de passer par Lyon et d'aller squatter chez Laurence. Le train part à 15 h 24 et je n'ai que le temps d'appeler Laurence pour savoir s'ils peuvent m'accueillir, de prévenir Marythé de mon changement de stratégie, de replier mes bâtons de randonnée dans mon sac à dos, de quitter mes grosses chaussures, d'acheter un coca-cola au distributeur le plus proche et de courir pour monter dans le bon wagon ! Du coup, je ne suis pas douché, ni changé. Ce n'est pas bien grave et je ferai tout cela ce soir chez Laurence.
Voyage tranquille en TER
en petite vitesse pour avoir le temps d'admirer au passage le lac de Serre-Ponçon et les contreforts du Vercors qu'on aperçoit très bien depuis Die. Tout ceci me rappelle de très bons souvenirs lorsque j'étais sur le plateau du Vercors en juillet 2013. Je descends du TER à Valence et cherche le TGV pour Lyon. En fait, il y a deux gares, Valence ville et Valence TGV et évidemment je suis descendu à la mauvaise. Heureusement le train n'est pas encore reparti et je remonte en vitesse pour redescendre un quart d'heure plus tard à Valence TGV où je prends le train pour Lyon. C'est beaucoup plus rapide et j'arrive sans encombre à la Part-Dieu. Je descends dans la station de métro et cherche ma carte de crédit en catimini car deux jeunes voyous importunent les voyageurs. Et trois stations de métro plus tard, j'arrive chez Laurence.
Je prends ma douche et me change avant de dîner sur la terrasse avec Pierre (qui revient du tennis) et Laurence. Je ne verrai pas les enfants car ils sont chez les parents de Pierre. Du coup, je dors dans le lit de Lisa. Nuit tranquille et le lendemain, après une bonne douche, je repars pour la Part-Dieu où j'arrive vers 9 h. Vingt minutes plus tard, alerte et évacuation de la gare. Un bagage suspect a été découvert. Mais un quart d'heure plus tard, tout rentre dans l'ordre et on est autorisés à rentrer dans la gare. Il y aura eu de l'animation jusqu'au bout. J'achète un sandwich chez Paul et j'attends Marythé qui arrive de L'Arbresle. Le hasard a voulu qu'on reparte par le même train, mais pas dans la même voiture... Le train est bondé et il n'est pas facile de changer de place.
Nous arrivons à Rennes vers 14 h 35 et nous allons prendre notre bus à la République pour rentrer à la maison. Tout est en ordre, il fait beau et la voisine a arrosé les plantes de Marythé. L'aventure se termine et je vais reprendre des occupations plus classiques et moins créatrices de rêves.